Malade

Ce matin, Yuki etait encore moins reveillé que d'habitude. Il se sentait fievreux, la tête lourde, le corps endormi. Il avait du mal a respirer et toussa trois fois sur le court chemi qui séparait sa chambre des escaliers.
Il descendit doucement, s'appuyant sur le mur pour ne pas tomber. Sa tête se mit a tourner. Il etait reellement malade !

Mais hors de question de le montrer. Il ne voulait pas inquieter Tohru ni se trouver en position de faiblesse face a ce stupide chat ! Et il ne voulait pas plus ennuyer Hatori.
Il ne s'etait jamais rendu compte qu'il y avait tant de marches a ces escaliers !

Arrivé en bas, dans le couloir, il voulut reprendre son souffle mais une violente quinte de toux le saisit, le mettant a genoux sur le sol, des larmes dans les yeux, une main sur le sol, l'autre sur le mur.

(Désolée de t'avoir laissé mourir aussi longtemps... )

Hatori était préoccupé ces derniers temps : nul besoin de préciser que ses pensées étaient toutes tournées vers une certaine jeune fille qu’il semblait étrangement trouver partout où il allait. Mais son histoire avec Kana l’avait bien trop fait souffrir pour qu’il accepte de croire que l’amour lui était encore possible et sans même s’en rendre compte, il se mettait des œillères pour ne pas avoir à constater l’évidence. Même si le printemps était encore loin, le gros ours commençait lentement à s’éveiller au redoux au fond de sa tanière.
Il n’était cependant pas assez aveugle pour aller jusqu’à nier que quelque chose le travaillait. Aussi en cette journée ensoleillée, il avait décidé de prendre son après-midi pour aller rendre visite à Shigure. Ses jeux de mots douteux et ses grandes envolées lyrique sauraient lui changer les idées, même s’il ne pouvait pas dire qu’il appréciait un tel comportement… surtout en public. Mais le chien avait le mérite de savoir exprimer ce qu’il ressentait, d’attirer les autres et de veiller sur eux. Lui ne faisait que nuire à son entourage.

Stationnant sa voiture au même endroit que la fois où il avait rencontré Kajila, Hatori se promena doucement dans la forêt avant de rejoindre la maison de son ami d’enfance. Il soupira et frappa à la porte. Pas de réponse. Personne dans le jardin non plus. C’est alors qu’il entendit un drôle de bruit à l’intérieur. Comme une toux particulièrement violent. Le médecin ouvrit la porte sans plus attendre et trouvant Yuki effondré au bas des escaliers, il courut jusqu’à lui et l’aida à s’asseoir confortablement.

« Ne te recroqueville pas, Yuki ! Tu gênerais encore plus ta respiration ! Quand as-tu attrapé froid ? Je t’avais dit de faire attention et de ne pas te découvrir trop tôt, l’hiver n’est pas encore si loin derrière nous….. »

Puis il entrouvrit le col du jeune homme et farfouilla dans les poches de son manteau, espérant y trouver un tube de ventoline, mais ne trouvant qu’un simple mouchoir et un trousseau de clés.

La porte s'ouvrit mais Yuki ne pu voir qui etait la, les larmes dans ses yeux et les quintes de toux qui n'en finissaient pas de finir l'en empechaient. Il entendit des pas précipités et reconnu les mains dHatori, puis sa voix et ses expressions.
Qu'est ce que le medecin faisait la ? quelqu'un l'avait appelé ? Il ne lui semblait pourtant que la maison etait vide !
Il se laissa docilement faire et s'apercut que la toux se calmait quand il se detendait et laissait ses poumons faire le plein d'air. Et aussi depuis qu'on avait deboutonné son col.
Il repensa a pourquoi il avait attrapé froid. Il savait que ce n'etait pas le moment de se decouvrir mais Honda-san frissonnait alors il lui avait donné sa veste...et même maintenant il ne le regrettait pas. Apres tout il n'avait qu'un simple coup de froid. On en mourrait pas ! Même s'il en avait l'impression !

Hatori...

Il mit un moment a reprendre son souffle.

Hatori...qu'est ce que tu fais la ?

Fit il, méfiant, craignant que le medecin ne soit venu que pour effacer la memoire de Tohru. Il avait du mal a ne pas lui en vouloir, il avait du mal a croire en la generosité d'Akito aussi. Il pensait bien que tout cela cachait quelque chose mais ne savait pas quoi, et cela le stressait encore plus. Il ne pouvait plus voir Hatori sans craindre pour Tohru...

Hatori fut rassuré en voyant Yuki reprendre une respiration régulière. La toux du jeune homme avait été si violente que le médecin avait craint que le Rat ait à nouveau des crises d’asthme, comme lorsqu’il était plus petit… Le jeune garçon aurait alors risqué de se transformer en public, et Hatori voulait à tout prix éviter d’avoir une fois encore à effacer des souvenirs. A tout prix !
Sans compter que la santé de son cousin lui tenait véritablement à cœur…
Encore plongé dans l’inquiétude qu’il éprouvait pour Yuki, Hatori fut profondément blessé par le ton soupçonneux qu’emprunta le jeune homme pour lui demander ce qu’il faisait là.
Il n’en montra rien, bien sûr. Il conserva un visage neutre, blasé, comme toujours. Il comprenait tout à fait que le Rat ait peur de lui, après tout ce qu’il lui avait fait subir…
Tous les souvenirs qu’il avait arrachés… Tous les amis que le garçon avait eu tant de mal à se faire que le médecin lui avait volés…
A présent qu’il était si lié à Tohru, que son bien être provenait de la présence de la jeune fille, il était tout naturel qu’il soit terrifié à l’idée de la perdre à son tour. Tohru avait l’air si précieuse à ses yeux… Elle devait l’être véritablement, d’ailleurs, pour avoir réussi à lui rendre le sourire, à apaiser son cœur. Hatori lui-même avait été réellement impressionné par la jeune fille, si gentille, si touchante, si rassurante…
Yuki devait avoir si peur qu’Hatori efface de la mémoire de Tohru les moments que les deux jeunes gens avaient passés ensemble ! Le Dragon comprenait cette frayeur, bien mieux que ne s’en doutait Yuki, pour avoir ressenti lui-même la douleur lancinante de « perdre » un proche de cette manière si horrible, pire même que si la personne aimée était morte, car il fallait vivre en sachant que jamais on ne pourrait demeurer à nouveau aux côtés de cette personne…
Repenser ainsi indirectement à Kana fut une souffrance atroce pour Hatori qui était venu chez Shiguré justement dans l’espoir de se changer les idées.
Il secoua vaguement la tête, comme pour chasser ses souvenirs qui le suivaient partout, cachés dans les paysages, les mots, les sourires… Se rendant alors compte qu’il avait laissé passé un long silence, il esquissa un semblant de sourire à Yuki pour le rassurer.

Ne t’inquiète pas, je venais seulement voir Shiguré pour parler un peu avec lui, histoire de respirer un peu hors du manoir et des caprices d’Akito…

Voyant le regard toujours suspicieux du Rat, il précisa :

Je ne suis pas venu pour Tohru. Akito n’a rien décidé à son sujet que tu ne saches pas.

Cette dernière phrase n’était peut être pas tout à fait vraie, mais de toute façon Hatori n’était pas toujours au courant des manigances du chef de famille à l’esprit si tortueux ; cela faisait longtemps qu’il avait fermé les yeux sur les horreurs que créait cette jeune fille pourtant si fragile, qu’il ne pouvait pas même se résoudre à haïr malgré ce qu’elle lui avait fait subir… Le médecin, qui avait décidément l’impression que chaque pensée le ramenait à Kana, entreprit d’ausculter Yuki avec les moyens du bord.

Je crois que ce n’est pas ton asthme, mais tu as pris un beau coup de froid. Comment t’y es-tu pris?

Puis, se souvenant la raison pour laquelle il était venu, il demanda en se redressant, très las :

Tu sais où est Shiguré ?

Le sourire du medecin n'etait pas vraiment tres franc, mais l'on voyait rarement Hatori montrer de la gaité aussi cela ne choqua pas le Rat qui l'examina un moment pour être certain qu'il disait vrai. Seulement le dragon avait toujours le même visage, lisse et blasé, il etait tres difficile de savoir ce que cela signifiait reellement.

Un peu rassuré par les affirmations du médecin, que l'on voyait rarement mentir, Yuki se rendit compte de sa maladresse. Il prit la main d'Hatori mais ne put parler tout de suite, une autre quinte de toux le saisissant.

Hatori,

fit il plus doucement que la premiere fois.

Arigato Hatori.

Il ne précisa pas s'il remerciait le medecin de ses soins ou de laisser Tohru tranquille.
Il reprit péniblement son souffle et tenta une conversation malgré la migraine qui lui vrillait les tempes et la fievre qui rendait sa reflexion plus que laborieuse.

Je...je ne sais plus...

...

Shigure dort je crois, il a chanté tard dans la nuit.

Le rat se leva et tituba un peu.

Je dois me changer pour aller au lycée. Merci, Hatori...

Il se raccrocha a sa siege pour ne pas retomber et se remit a tousser. Il esperait ne pas avoir chopé de grippe. Depuis la mort de son pere, Tohru etait toujours si inquiete lorsque lui ou ce stupide chat attrapaient ne serait-ce qu'un rhume...

Hatori...ne dit rien...a Tohru ou a ce stupide chat...s'il te plait...

Hatori fut touché quand Yuki le remercia en lui prenant la main, sans que cela efface pour autant la douleur qu’il avait ressenti il y avait quelques secondes.
Cette douleur, il la connaissait si bien. Ce sel que l’on versait régulièrement sur les blessures de son âme qui ne se décidaient pas à cicatriser, il le connaissait par cœur, et il faisait semblant d’ignorer sa morsure acide quand elle se faisait sentir, c’était à dire souvent.
Le Dragon passa sa main sur les cheveux du jeune homme, dans un geste paternel, pour lui faire comprendre qu’il ne lui en voulait pas. Hatori, à vrai dire, s’inquiétait bien plus de la toux violente qui secouait le garçon à chaque bout de phrase. Il semblait vraiment mal en point…
Le médecin écouta à peine Yuki quand il parla de Shiguré, à présent il était réellement convaincu de la relative gravitée de son état : son visage était pâle, transpirant de fièvres, ses yeux cernés semblaient hagards, et il ne parvenait pas même à marcher droit.
Et il parlait d’aller au lycée alors qu’il ne tenait pas debout, et qu’il était même obligé de se tenir au fauteuil pour ne pas s’écrouler par terre !
Hatori passa sa main sur le front de Yuki. Il était brûlant.

Aller au lycée ? Dans cet état ? Voyons Yuki tu n’y penses pas! Regarde-toi, tu tiens à peine debout…

Hatori le rattrapa avant qu’il ne tombe. Il prit un bras du jeune homme qu’il passa derrière son cou, pour le soutenir jusqu’à sa chambre.

Tohru et Kyo sauront de toute façon que tu es malade, parce qu’il est hors de question que tu ailles où que ce soit ce matin ! Dans ton état, tu risquerais de te transformer…

Le médecin assura sa prise sur son épaule, pour que le Rat puisse marcher au moins quelques mètres.

Tu vas aller bien sagement dans ton lit, en attendant que je te ramène les médicaments appropriés ! Surtout qu’on dirait que tu as attrapé une bonne grippe. Tu ne sortiras sûrement pas de ton lit avant un ou deux jours !

Hatori ne le dit pas, mais il espérait qu’il n’y aurait pas de complications. Yuki semblait très malade, et comme tous les Douze, il avait une constitution fragile qui ne risquait pas d’arranger les choses…

Yuki etait bien trop epuisé pour discuter. Il aurait aimé dire que non, qu'il allait bien et qu'il devait aller en cours mais sa respiration etait trop laborieuse pour cela. Puis il devait admettre que le medecin avait raison. Il risquait de se transformer d'un moment a l'utre et si cela arrivait au lycée, Akito serait furieux. Il l'enfermerait et peut etre meme ferait du mal a Tohru pour le punir lui.
Pauvre Tohru, pourvut qu'elle ne se fasse pas trop de soucis. Puis la laisser seul au lycée avec le chat...bon elle avait ses amies pour l'aider mais tout de même !

Il se laissa porter par Hatori jusqu'a sa chambre et s'endormit avant même que sa tête ne touche l'oreiller. Endormi ou inconscient, difficile de le dire. Le Rat tremblait de fievre mais il n'y avait rien a faire et en lui, l'adolescent faisait confiance a Hatori pour le soigner.