maquillage entre deux cours...

Raya marchait d’un bon pas dans le couloir du lycée. Elle venait de donner un cours particulièrement mouvementé à des premières années, et en avait un autre à dispenser à des terminales, du moins il lui semblait. Elle décida d’ailleurs d’arriver en retard à ce cours-là, estimant qu’elle avait déjà fait assez d’efforts pour la matinée en essayant de faire rentrer trois mots de français dans la cervelle de ces élèves idiots.
Coinçant son livre de français sous son bras, elle farfouilla un moment pour trouver un tube de rouge à lèvres. Comme elle ne parvenait pas à mettre la main dessus, elle s’arrêta au milieu du couloir pour mieux le chercher. Quand enfin elle le délogea, coincé qu’il était entre un gloss, un carnet d’adresses, et un stylo, elle le saisit si vivement qu’il lui échappa des mains, et roula vers les casiers à chaussures des élèves.
Jurant entre ses dents, Raya s’avança dans cette direction, avant de constater que le tube s’était arrêté au pied d’une élève. Refusant catégoriquement de se baisser pour le ramasser devant ce lycéen ( question de principe…) , elle préféra l’apostropher pour qu’il le fasse lui-même.

Toi, là, ramasse mon tube de rouge à lèvres. Tu ne vois pas que tu as failli l’écraser ?

Sa voix, dénuée de toute patience, était peut être un brin autoritaire et colérique. Raya n’avait même pas regardé le visage de l’élève, absorbée comme elle l’était cette fois par la recherche de son petit miroir. Elle ne s’était donc pas rendue compte qu’elle venait de parler à Kajila, avec qui elle avait déjà une conversation pour le moins houleuse il y avait de cela quelques jours…

Kajila ne voyant pas arriver le professeur de francais s'etait décidée a aller la chercher dans la salle des profs. Elle savait qu'elle etait la, l'ayant vu traumatiser quelques noobs ce matin.
L'adolescente se promenait donc dans les couloirs, nez au vent, mains dans les poches et ses pensées a milles lieux d'ici, dans un manoir de la ville pret d'un etang a poisson...entre les bras d'un medecin...
Rêver etait agréable parfois, et plus elle fréquentait Hatori, plus elle pensait a lui et revait de le revoir, encore, et encore, et encore...

Soudain un bruit la ramena sur terre et elle s'appercu qu'elle avait failli entrer dans son professeur. Surprise, elle s'arrêta net et regarda la jeune femme en levant les sourcils. Que faisait elle au casier a chaussure alors qu'ils avaient cours ?
Ellesuivit son regard et tomba sur un tube de rouge a lèvre. Serviable, car de bonne humeur, elle allait se baisser pour le ramasser lorsque Raya le lui ordonna.
Plus surprise encore par le ton utilisé, Kajila lui enoya un regard interrogatif avant de froncer les sourcils et de faire un grand sourire. Puis, d'un geste souple du pied, elle fit rouler le tube sous les casier, la ou personne ne pouvait plus le rattraper. En effet, l'espace entre les boites de fer et le sol etait assez grand pour un tube, voire une main mais certainement pas pour un bras !

Elle regarda ensuite à ses pieds avant d eplanter ses yeux bruns dans celui de son professeur.

Ramasser quoi madame ?

Raya eut une exclamation de satisfaction ; elle avait enfin trouvé son miroir, caché lui dans un repli de son sac à main Dior. Elle l’ouvrit aussitôt, prit le temps de se recoiffer.
Elle avait presque oublié la présence de l’élève qui se tenait en face d’elle, et si Kajila n’avait pas parlé, elle serait sûrement repartie avant de se rendre compte un peu plus tard de l’absence de son tube de rouge à lèvres.

Eh, bien, mon rouge à lèvres, bien sûr ! Enfin, vous…

L’enseignante, qui avait commencé à parler d’un ton agacé, releva soudain la tête. Elle avait reconnu cette petite voix ironique. Elle se retrouva alors nez à nez avec Ryu, ce qui la fit froncer les sourcils. Elle baissa alors les yeux, et comprit aussitôt ce que la lycéenne venait de faire. Pas un seul instant elle n’envisagea seulement d’essayer de l’attraper en passant sa main sous les casiers, qui de toute façon n’aurait pas passé. Hors de question de se conduire comme un de ces ploucs !
Contrairement à toute attente, elle eut un grand sourire.

Tiens, tiens, encore vous ! C’est que vos remarques insolentes et désagréables m’avaient presque manqué ! Les élèves de ce lycée sont désespérément sages ou idiots, voyez-vous…

C’était presque vrai. Dans le fond, Raya appréciait beaucoup la présence de Kajila parce que la lycéenne n’avait pas peur d’elle et avait un sens aiguë de la répartie (bien que, selon elle, nettement inférieur au sien…) ; ce qui rendait leurs échanges particulièrement ardus et donc stimulants pour la jeune femme. D’accord, elle adorait martyriser de pauvres gens trop gentils ou trop immatures pour se défendre correctement, mais elle aimait tout autant trouver un adversaire digne de ce nom. Ce genre de défi lui plaisait beaucoup, surtout qu’elle n’avait qu’exceptionnellement l’occasion d’en relever, les personnes qui lui résistaient se faisant rares.
De son regard perçant, Raya observa la jeune fille des pieds à la tête. Un petit visage mutin, un menton volontaire, des yeux brillants et déterminés, un sourire ironique. Et surtout des vêtements horriblement simples et usés ! Pour une fashion victime comme Raya, il était tout simplement inconcevable de porter ce genre d’accoutrement… Elle eut une vague grimace.

Fort bien, mademoiselle, à présent vous avez deux solutions : soit vous vous débrouillez pour récupérer le tube en poussant les casiers à chaussures –bien que vu votre gabarit, je ne vous donne guère de chance- , soit vous me remboursez le prix de ce cosmétique, c’est à dire 2500 yens.

C’était exorbitant pour un tube de rouge à lèvres, mais Raya n’avait pas menti pour son prix, elle l’avait acheté chez un maquilleur de luxe.
La jeune femme regarda un moment ses ongles en se disant qu’elle devrait refaire sa manucure cette après-midi. Dans le même temps, elle poursuivit distraitement.

Bien entendu, dans les deux cas vous aurez des heures de colle. De toute façon, vous m’aviez bien signifié que cela ne vous gênait pas de rester après les cours pour faire des devoirs supplémentaires, n’est-ce pas ?

Sur sa dernière phrase, elle avait relevé les yeux pour adresser un autre sourire sarcastique à l’adolescente. Elle prit ensuite un ton calculateur, comme une vendeuse dans un magasin.

Enfin, sachez que si vous choisissez la deuxième solution, je n’accepte pas les paiements par chèque, que la somme n’est pas négociable, et ne peut être payée en plusieurs fois.

Sur une mine entendue, elle poursuivit un peu plus bas :

Bien sûr, si vous n’avez pas les moyens, nous trouverons un arrangement…

Kajila regretta son geste. Elle aurait pu l'enerver encore plus en ramassant le tube et refusant de le rendre. Elle n'avait pas reflechit et avait loupé une bonne occasion. Mais bon, il y avait encore des choses a tirer de cet entretiens. Raya et elle ne se supportaient pas, l'adolescente éprouvant pour son professeur a la fois le mépris des riches de naissance envers les parvenus et celui des classes pauvres envers les snobs.
Malheureusement, elle ne put qu'aquiescer à la premiere remarque de l'enseignante. Avec un soupir, elle ajouta :

Oui, ils sont chiants, aucun interet.

Elle etait serieuse, elle en avait assez de voir les autres eleves faire profil bas, ne pas oser lui répondre, s'ecarter devant elle, ou prendre mal ses provocations. Sans parler de l'obeissance aveugle aux professeurs... ce qu'ils etaient barbant ! Heureusement Soren se demarquait un peu du lot avec ses remarques etranges. Limay aurait pu être bien si elle n'etait pas focalisée sur les garcons !
Se sentant observée, la jeune fille detailla le professeur du regard. Silhouette fine, modelée, cheveux coiffés, ongles manucurés, maquillage parfait, et toujours ces habits si ostensiblement chers...elle n'avait pas comprit que lorsque l'on a des moyens, on achetait pas obligatoirement une robe de prix, mais simplement ce que l'on souhaitait.

Oh ? Et comment vous comptez vous vous y prendre pour me faire payer 2500 yens si je n'en ai pas envie ?

De toute facon elle ne les avait pas. Mais les aurait elle eu qu'elle ne les aurait pas payé, pas plus qu'elle comptait rattraper le tube (même si avec un aimant accroucha au bout d'une ficelle ce n'etait pas bien difficile). Les heures de colle, ce n'etait pas un problème.
Elle sourit en entendant Raya donner des ordres pour être payée. Kaj avait décidé d'assumer son acte mais pas de le regretter. Hors de question qu'elle s'excuse, paye ou fasse quoi que ce soit que le cerveau malade de la jeune femme avait imaginé.

Vous n'avez cas envisager de vous passer de rouge a lèvre aujourd'hui...

Il prit un air faussement compatissant.

Je sais que c'est dur mais vous POUVEZ y arriver.

Même si elle faisait tout pour ne pas le laisser paraître, Raya était très agacée. Ce rouge à lèvre lui plaisait beaucoup, et elle ne pourrait pas en racheter un avant le lendemain. Autrement dit, une journée entière à tenir sans se remaquiller en perspective ! Cela l’ennuyait presque plus que de donner des cours de français.
La jeune femme haussa un sourcil devant la remarque de Kajila. Puis elle eut un petit sourire, avant d’énumérer aussitôt :

Eh bien, tout d’abord, je pourrai vous mettre assez d’heure de colles pour avoir le temps de repeindre tous les murs du lycée avec un pinceau de la taille de mon petit doigt. Je pourrai aussi vous faire faire le ménage dans les salles de classe chaque soir jusqu’à la fin de l’année. Je pourrai –et c’est là le plus intéressant- dire que vous m’avez volé ou perdu un objet de valeur, et discuter de votre cas aux autres professeurs, ce qui ternirait quelque peu votre réputation auprès de mes vénérables collègues. Sans compter que je pourrai aussi leur faire valoir l’idée possible d’un renvoi définitif, sinon pour quelques jours.

La regardant droit dans les yeux de son regard perçant, histoire de la convaincre qu’elle était tout à fait capable de la faire renvoyer pour une histoire de rouge à lèvres, elle ajouta :

Oh, et ne croyez surtout pas que vous serez protégée par vos bonnes notes et votre aspect irréprochable. S’il le faut, je trouverai très facilement quelques histoires pas claires auxquelles vous seriez mêlée…

Raya la regarda une fois de plus de haut en bas ; vu ses vêtements, elle ne devait pas être sortie d’un milieu très aisé, il serait donc d’autant plus facile de l’incriminer (dans l’esprit de l’enseignante, pauvre = voyou). N’importe quelle histoire de bas quartier ferait l’affaire.

Je vous conseille donc très vivement de me rendre ce rouge à lèvres –et oui, ce sont des menaces.

Après un bruyant soupir, la jeune femme croisa résolument les bras. Puis elle eut une mine horrifiée aux paroles de Kajila. UNE JOURNEE SANS ROUGE A LEVRES ? IMPOSSIBLE pour la professeur ! Ne pas se remaquiller, être ainsi négligée, et passer ainsi pour un, un, un…un pauvre !!! Tout, mais pas ça ! Elle ne supporterait pas qu’on la confonde avec un de ces miséreux des quartiers malfamés !

Vous plaisantez j’espère ? Comment pouvez-vous seulement imaginer que je vais passer une journée sans me remaquiller ?

Raya éclata de rire, cette idée lui paraissait tout bonnement ri-di-cule.
Puis elle fronça les sourcils.

Bien sûr que non, je ne peux pas ! Ce tube de rouge à lèvre, pour moi, c’est comme… eh bien, c’est comme vous et votre sens de l’humour –si toutefois « humour » est le mot qui convient- ! Ma très chère demoiselle –je ne sais plus votre nom mais à vrai dire je m’en moque- vous avez tout intérêt à me retrouver ce tube…

La jeune femme approcha son visage de celui de l’adolescete rebelle, jusqu’à presque le toucher. Tout humour avait disparu sur sa face, qui à présent prenait des contours menaçants. Sa voix devint âcre, dure, implacable. Effrayante.

Sinon je serai très, très contrariée…

Hatori soupira.
Il revenait de chez Shiguré, avec qui il avait parlé un moment, et qui lui avait demandé de passer au lycée pour amener leurs déjeuners aux deux garçons qui les avaient oubliés. Puisque c’était sur son chemin, que Kyo et Yuki ne pouvaient pas vraiment se permettre d’être affaiblis par un repas manqué –ils risqueraient de se transformer !-, et que lui, Hatori, était un modèle de gentillesse et de bonté –non mais qu’est-ce qu’il ne fallait pas entendre- , Le Chien l’avait supplié –au bas mot !- de faire ce détour.
Comme s’il n’avait pas assez de choses à faire ! Enfin, ce n’était pas comme s’il pouvait refuser. En maugréant, il avait pris le chemin de l’école, et en arpentait à présent les couloirs. Le pire, c’était qu’il ne savait absolument pas où chercher ! La dernière fois où il était venu ici remontait, il lui semblait, à la fois où il avait accompagné Momiji à la fête. Autant dire à une éternité…
Il observait les visages autour de lui, tentant de repérer ceux familiers du Lapin, d’Haru, de Tohru, du Chat, du Rat où même de Mayuko Shiraki puisqu’elle enseignait ici. Il était un peu perdu au milieu de tant d’adolescents, il n’avait vraiment pas l’habitude de ce genre d’entourage. Il récolta, au passage, quelques chuchotements ou gloussements surexcités de lycéennes qui le regardaient, et les ignora du mieux qu’il put, conservant comme toujours son visage blasé.
Le médecin avança ainsi au hasard un moment, avant de s’arrêter, surpris : il venait de reconnaître un visage… celui de Kajila ! C’était bien le dernier endroit où il pensait la revoir ! Mais comment avait-il pu négliger qu’elle fréquentait le même lycée que ses cousins ?…
Le Dragon hésita un moment. Devait-il la saluer, passer son chemin ?… La connaissait-il assez pour l’aborder dès qu’il la voyait ? Un regard de la jeune fille mit fin à ses tergiversations ; elle l’avait vu, il n’avait plus d’autres choix que de lui dire bonjour sous peine de paraître impoli.
Il s’approcha donc, pas franchement pressé, car il se demandait ce qu’il allait lui dire, et se rendit alors compte qu’elle était en pleine conversation avec une grande dame aux longs cheveux ondulés, dont le beau visage était déformé par l’agacement et le sarcasme. Sans doute un professeur. Kajila semblait lui répondre avec amusement ; son petit sourire ironique, que le maudit commençait à connaître, ne quittait pas ses lèvres.
Nouvelle hésitation.
Devait-il les interrompre ? Il s’arrêta à quelques centimètres des deux demoiselles, ne sachant trop que faire. Il entendit bien malgré lui la dernière phrase de la femme, et se dit qu’il était tombé à un très mauvais moment…
Puis, voyant qu’elles s’étaient tues et qu’elles le dévisageaient toutes deux, il s’approcha résolument.

Bonjour, Kajila-san. Je suis ravi de vous rencontrer à nouveau, bien que ce moment ne me semble pas idéal…

Se tournant alors vers la jeune femme qui le regardait avec étonnement, et qu’il ne pouvait décemment ignorer, il s’inclina légèrement.

Je vous prie de m’excuser de vous avoir interrompue dans votre conversation, Madame. Je suis Soma Hatori. Je ne crois pas avoir l’honneur de vous connaître ?

Ses paroles courtoises étaient débitées d’un ton monocorde, sans aucune intonation particulière ; les réponses de la jolie dame ne l’intéressaient que peu, à vrai dire. De toute façon, il ne lui aurait jamais adressé la parole s’il n’y avait pas été plus ou moins obligé. Il était assez curieux toutefois de voir la réaction de Kajila ; il n’avait jamais vu son comportement en milieu scolaire…

Kajila ecouta d'une oreille distraite les habituelles menaces. Les heures de colle et le renvois. Les professeurs n'avaient vraiment pas d'imaginations. Tout en gardant un visage lisse, elle promenait son regard amusé sur les gens qui passaient dans la salle.

Cene sont pas les heures de colle qui...

Elle s'interrompi au milieu de se phrase, ne pouvant dissimuler une intense surprise, suivit d'une grande joie. Son coeur se mit a battre dans sa poitrine a un rythme demesuré. C'etait Hatori qu'elle venait d'apercevoir, elle en etait certaine !
Rapidement, l'adolescent se recomposa un visage et reporta son attention sur son adversaire.

Ce ne sont pas les heures de colles qui vous rendront votre rouge à lèvre ou vous le rembourseront.

Son sourire etait certes ironique et son visage lisse, mais le coeur n'y etait plus. Une ombre dans la foule avait volé ce qui en restait avec l'attention de l'adolescente qui s'attendait a lvoir surgir le dragon derriere elle tout le temps. Elle savait qu'il l'avait vu, leur regards s'etaient croisés...par contre elle ignorait s'il allait venir la saluer. Pourquoi l'aurait-il fait d'ailleurs ? Il etait surement venu pour une raison précise qui n'avait rien a faire avec elle.

Le sourire de l'adolescente s'agrandit. Son professeur avait l'air d'un junkie en manque et croyez la, elle en connaissait un rayon la dessus !
La jeune fille allait répondre a la jeune femme que sa comparaison etait bancale etant donné qu'elle etait née avec son sens de l'humour –si toutefois « humour » est le mot qui convient- tandis que Raya n'avait toujours eu ce rouge a levre, lorsqu'Hatori apparut pres d'elle et la salua juste au moment ou elle haussait les epaules en rétorquant avec philosophie :

La vie est remplie d'une foule de contrariétés.

Bien qu'elle soit gênée de savoir qu'Hatori avait entendu cette phrase frisant l'insolence, Kajila n'exprimait qu'amusement et bonne humeur. Sans attendre la réponse de son professeur, elle se détourna de lui et salua tranquillement le médecin.

Bonjour Hatori-sama.

Elle le regarda un moment, essayant de percer ce qui se cachait derriere ce regard froid et blasé. N'y parvenant pas, elle fit sobrement.

Vous semblez aller bien aujourd'hui. Je ne m'attendais pas a vous voir.

Et pour qu'aucun malentendu ne subsiste, elle ajouta

Et vous ne pouviez pas mieux tomber, Ayunoka-sensei et moi ne nous disions rien d'interressant.

Elle profita de l'inclinaison du medecin pour defier Raya de la contredire et sourit, plus sure d'elle même que jamais. La proximité d'Hatori la rendait euphorique, elle se sentait invincible, protégée et fiere. Si Raya avait cru une seconde faire plier Kajila, ce n'etait même plus la peine d'y penser !

Raya, intriguée, suivit le regard de Kajila lorsque celle-ci s’interrompit au beau milieu de sa phrase. Elle vit alors un bel homme qui la regardait, grand, les cheveux noirs, de magnifiques yeux verts …Juste cette expression triste et austère qui ne lui disait rien qui vaille… Mais dans l’ensemble.. pas mal du tout ! (miam miam…)
Aussitôt, la jeune femme replaça deux longues mèches ondulées derrière son oreille (en un pur réflexe), puis regretta amèrement la perte de son tube de rouge à lèvres. C’était maintenant qu’elle en aurait bien eu besoin ! Raaaaaah, cette Kajila… Elle s’occuperait de son cas plus tard… et elle s’en occuperait comme il fallait.
Chassant de son esprit toute idée de vengeance ou d’animosité pour le moment, elle se composa un visage le plus charmant du monde lorsqu’elle vit que l’homme s’avançait vers elles. Il parut hésiter, puis s’approcha avant saluer Kajila. La jeune enseignante en fut un instant mortifiée. Comment, ils se connaissaient ! Et pourquoi la saluait-il en première, elle, une simple lycéenne, et insolente par dessus le marché ? Alors qu’elle-même était la plus âgée, et professeur dans le lycée ?
Sans rien montrer de ses sentiments, elle fit un grand sourire aimable, sans rien dire puisqu’il ne lui avait pas adressé la parole. Raya eut un léger sursaut en entendant Kajila prononcer le nom de l’individu…Hatori ? Serait-ce le cousin de Shiguré et d’Ayamé, dont l’écrivain lui avait parlé ? C’était possible, ce prénom n’était pas si répandu que cela… La jeune femme observa alors l’apparence du maudit au peigne fin, en tentant de se remémorer ce qu’on lui avait dit à son sujet. Il était médecin, ce qui collait parfaitement avec le suffixe marquant le respect qu’avait employé l’adolescente, ainsi qu’au costume de marque qu’il portait. Il avait assez d’autorité sur le couturier Ayamé pour tarir son flot de paroles… oui, c’était possible, au vu de son air calme et même blasé…
Son côté calculateur refit alors lentement surface par dessus son indignation, et l’enseignante s’appliqua à détailler les deux personnes, pour tenter de comprendre un tant soi peu le lien qui les unissait. Hatori était trop jeune pour être son père. Ils se vouvoyaient, ils n’étaient donc pas si proches que cela.
Raya scruta soudain avec étonnement le visage de Kajila, qui semblait comme transformé. Même l’enseignante arrivait à percevoir l’espèce d’aura qui entourait la jeune fille alors qu’elle parlait au médecin… Et ce sourire… ses yeux qui pétillaient de malice et de bonheur… Raya n’avait jamais connu l’amour, mais elle avait assez vécu et côtoyé de personnes différentes pour le reconnaître quand elle le voyait… Etait-il possible que… ?
La jolie femme fut interrompue dans ses réflexions par la remarque de Kajila. Furieuse, l’enseignante lui adressa un regard noir, puis provocateur, avant de se fendre d’un grand sourire on ne pouvait plus hypocrite pour approuver ses paroles.

C’est vrai, notre conversation n’avait aucune importance…

…puisque de toute façon, quoi que Kajila dise, quoi qu’elle fasse, dès l’instant où elle avait provoqué l’enseignante, celle-ci avait décidé de lui rendre la monnaie de sa pièce, et au centuple. Aujourd’hui, demain, dans une semaine… La vengeance est un plat qui se mange froid. Et il était à son menu…
C’est alors qu’Hatori se présenta. Ainsi, c’était bien LE Hatori Soma !

Je vous en prie, ce n’est rien. Je suis enchantée de faire votre connaissance, Monsieur Soma (*et plutôt deux fois qu’une ! ) ...
Mon nom est Ayunoka Raya, je suis une des professeurs de Kajila

Elle s’inclina à son tour, avant de lui sourire de plus belle, ravie de l’aubaine.
Penchant légèrement la tête sur le côté, elle prit un air intrigué.

Mais je vois que vous vous connaissez… ?

Le changement d’attitude de la jeune femme était radical : toute trace de mépris ou de dégoût avait disparu de son visage, et même en cherchant bien, on n’y voyait que douceur, bienveillance, et gentillesse. Peut être qu’en regardant de très, très près, on pouvait déceler la petite flamme d’hypocrisie et de malice qui dansait dans ses yeux…

Hatori avait la vague impression d’être arrivé à un très mauvais moment. La tension qui régnait entre les deux femmes était plus que perceptible, même pour le médecin qui habituellement ne se rendait pas compte de ce genre de détail…
En tout cas, cela ne semblait pas gêner Kajila qui s’exprimait comme si l’enseignante avait été absente. Le Soma répondit, se demandant si sa remarque comportait un quelconque sous-entendu… Il n’allait pas mieux, pas plus mal qu’un autre jour…

Oui, je vais très bien, merci.

Il allait ajouter l’objet de sa visite quand la jeune fille reprit la parole, et de toute évidence pour provoquer la jeune femme. Hatori haussa un sourcil, et dit à son tour, presque amusé :

Vous avez aussi l’air très en forme…

Il regarda la professeur, intrigué par la réaction qu’elle allait avoir. Mais celle-ci ne fit que lui adresser un grand et magnifique sourire (sans aucun effet sur le maudit) avant d’approuver les paroles pourtant offensantes de la lycéenne. Le médecin se demanda si elle était vraiment gentille et indulgente, ou si elle se retenait parce qu’il était là…
Hatori se sentit un peu coupable, à tous les coups sa présence allait encore causer des ennuis à Ryu. Il résolut d’écourter au plus vite cette conversation, d’autant plus qu’il était venu pour une toute autre chose !
Il écouta, l’air blasé et même presque ennuyé, la jeune femme se présenter. L’enthousiasme et l’amabilité dont elle faisait preuve pour lui parler le déconcertaient légèrement.
Il l’observa vaguement, à la dérobée et sans aménité. Au premier coup d’œil, on voyait tout de suite que cette femme faisait très attention à son apparence…

Enchanté également, si c’est le mot qui convient…

Un sourire adorable, des yeux pétillants, une voix douce et aimable, un joli penchement de tête… Raya Ayunoka paraissait tellement gentille et charmante que c’en devenait un peu louche. Le médecin fronça les sourcils. Il avait l’impression que quelque chose clochait dans son attitude… Son comportement ne cadrait pas vraiment avec la phrase qu’il l’avait entendue prononcer juste avant qu’il n’arrive… Peut être que finalement, elle n’était pas très naturelle… Bah, ce n’était sûrement qu’une impression.
Il fallait toujours qu’il s’obstine à voir le mal partout, pourquoi est-ce qu’il n’arrivait jamais à faire confiance aux gens ?...
Il fut par contre un peu gêné par sa question beaucoup trop curieuse à son goût, bien qu’au fond parfaitement légitime.
Il avait beaucoup de mal à définir les rapports qu’il avait avec Kajila lui-même, alors pour l’expliquer aux autres… Bien sûr, il se souvenait parfaitement du jour de leur rencontre ! A ce moment-là, elle était si petite… Il l’avait alors revue, plus tard, bien plus tard… De nombreuses fois d’ailleurs, réalisa le Dragon. Et à chaque fois, ç’avait été…étrange… Pourquoi est-ce qu’il n’arrivait pas à savoir s’il était content ou au contraire contrarié de la voir ? Pourquoi est-ce qu’elle ne lui était pas totalement indifférente ? Pourquoi est-ce qu’il n’arrivait jamais à définir ce qu’il ressentait ?
Il hésita un moment, ne sachant trop que dire. Il se racla la gorge, jeta un coup d’œil à Kajila, puis opta pour une demi-vérité :

Nous faisons partie de la même famille, même si nous sommes des parents très éloignés…

Espérant que la curiosité de la prof n’irait pas plus loin, il fuit son regard en scrutant la foule d’élèves et de professeurs derrière elle. Se rappelant soudain qu’il n’avait toujours pas évoqué la raison de sa visite, et que cela ferait un excellent changement de sujet, il lâcha :

A vrai dire, j’étais venu pour voir Kyô et Yuki Soma. Peut être les connaissez-vous ? Un rouquin, et un autre aux cheveux gris, toujours en train de se chamailler...

Le terme de "chamailler " était peut être un peu léger pour parler de la haine tenace que se vouaient les deux garçons, qui les poussaient souvent à des combats meurtriers...
Il ne savait pas si Ryu les avait déjà rencontrés… Pourtant, ça n’aurait pas été étonnant, vu qu’ils étaient dans le même lycée ! Le médecin s’en rendait compte seulement à présent. Et puis, surtout, ils ne passaient pas franchement inaperçus…
Il avait toutefois soigneusement omis la raison pour laquelle il voulait les voir.
Jouer la nounou en famille, passe encore.
Admettre devant Kajila et une de ses professeurs qu’il amenait les déjeuners de ces deux garnements qui les avaient oubliés, jamais !

Voir Hatori plaisanter un peu sur ses provocations fit petiller les yeux de l'adolescente et agrandir son sourire. Il semblait moins tendu qu'avant en sa présence. C'etait vraiment chouette. Pour un peu elle en aurait oublié la présence de Raya.

Oui très !

Fit elle energiquement. Une Kajila deja de bonne humeur à la base, proche d'Hatori et venant de recevoir ce qu'elle considérait comme un compliment ne pouvait qu'etre de bonne humeur !!
Par contre le changement radical de Raya ne lui plut pas mais pas du tout. Elle n'etait pas aveugle et savait bien que son professeur etait une tres belle femme. Elle savait également, pour l"avoir deja vue qu'elle s'y entendait tres bien a draguer les hommes. Et la voir ainsi jouer le role du gentil professeur tellement indulgent avec ses eleves adorés l'enervait plus qu'un peu. Heureusement cela ne semblait pas marcher sur le dragon qui gardait un air froid, presque ennuyé.

Elle frissonna lorsque Raya leur demanda leur lien exact. Hatori etait son cousin au...12 eme degre si elle se rappelait bien, c'etait egalement le n°2 ou 3 dans la hierarchie du clan, le médcin en chef de la famille, son maître de stage et l'homme qu'elle aimait. Elle esperait bientot pouvoir egalement le présenter comme un ami.

Vous ne devriez pas.

murmura-t-elle en entendant Hatori se dire enchanté de la rencontrer. Elle savait que ce n'etait qu'une formule de politesse sans beaucoup de sens dedans mais le professeur se montrait d'une hypocrisie monstre et l'adolescente, toujours honnete malgre ses mensonges, ne detestait rien tant que la lacheté de ce genre d'atitude.

Hatori-sama est un cousin éloigné. Mais je ne vois pas en quoi cela vous regarde.

Lacha-t-elle avec une froideur qui etonnait chez elle. Elle se tourna alors vers Hatori, comme si son professeur n'existait plus et reflechit rapidement à sa question.

Le prince et son cousin ? A cette heure, soit ils sont avec Honda dans la cours, soit le prince est dans sa salle de classe, à l'etage au dessus et le fils du Maître sur le toit.

Elle ne nommait jamais Kyo par son prénom, comme toujours. Pour elle le chat etait soit le cousin du prince, soit le fils du maitre.
Elle hésita. En temps normal elle aurait proposé a Hatori de faire sa course mais la...elle voulait rester pret de lui, et surtout ne voulait pas le laisser seule avec le Caméléon !

Ou alors ils sont avec leur fan club respectifs... j'peux vous montrer ou c'est si vous voulez, mais le plus simple serait de faire une anonce dans le mico du bahut.

Elle jeta un regard noir à Raya.

Seulement les eleves ne peuvent pas decider de ce genre de trucs. Va falloir voir avec Elle

Un fort mepris resonna dans sa voix. Hatori pensait peut-être qye la lycéenne detestait Kana mais la colere et le mépris que lui inspirait Raya etait bien plus fort.

Raya était foncièrement déçue par la complicité évidente que l’on décelait entre le médecin et Kajila d’une part, et entre la froideur qu’Hatori avait à son égard d’autre part .
Raya avait bien trop l’habitude d’être admirée pour accepter sereinement qu’on l’ignore.
Comment, il osait la snober, elle ! Qu’est-ce que ça voulait dire, ça, « si le mot convient » ??? (fort heureusement, elle n’entendit pas le chuchotement de Ryu, ce qui lui évita d’être tentée d’abandonner son visage d’ange). Bien sûr qu’il convenait, on parlait d’elle, de Raya Ayunoka, quand même ! A défaut d’adulation, elle méritait un respect un peu plus marqué ! Pour qui est-ce qu’il se prenait, celui-là ? Il croyait peut être qu’il allait réussir à lui résister en faisant semblant de ne pas la voir ? Eh bien, il allait la voir, oh, oui, il n’était pas près de l’oublier ! Ne serait-ce que pour embêter une certaine jeune fille qui lui avait volé son rouge à lèvres et qui semblait ressentir quelque chose de…particulier pour Hatori Soma.
La jeune femme était dans une véritable crise d’égocentrisme, et pourtant personne n’aurait pu le deviner en la voyant. Souriant de toutes ses dents blanches et parfaitement alignées presque sans une minute d’arrêt (à se demander si elle n’avait pas mal aux mâchoires), elle écouta de l’air le plus aimable et le plus charmant du monde le médecin dire que l’adolescente et lui étaient cousins.
Des parents, mais oui, bien sûr… vu les regards qu’ils se jetaient, il auraient prétendu être la réincarnation de Marie-Antoinette et Louis XIII que cela l’aurait moins étonnée. Enfin, peut être faisaient-il vraiment partie de la même famille.
Raya ne put s’en empêcher :

Vraiment ? Vous ne vous ressemblez pas du tout !

Elle avait dit cela l’air le plus naturel du monde, avec une telle innocence qu’il semblait jamais colombe ne fut plus blanche qu’elle.
La réplique de Kajila la hérissa pourtant, et sa nuque se raidit. Ce fut d’ailleurs le seul signe « visible » de son irritation. Pour être bien certaine qu’elle ne laisserait rien transparaître, elle baissa la tête avec une humilité feinte et dit :

C’est vrai, vous avez raison. Je vous prie d’excuser ma curiosité.

Intérieurement, elle bouillait. Cette petite impertinente, insolente, -inconsciente !- allait déguster, ça, elle le promettait ! Elle décida de tout faire pour semer la zizanie entre cette ado détestable et son petit médecin chéri…
Puis le médecin en question parla de la raison de sa venue.
Raya était absolument incapable de l’aider, pour la simple et bonne raison qu’elle ne connaissait pas du tout ces deux garçons. Oh, il était fort possible –et même probable- qu’ils aient suivi ses cours, mais il se trouvait qu’elle donnait la plupart de temps une série d’exercices extrêmement complexes à ses classes pour pouvoir lire tranquillement son magazine de mode (attendez, il fallait bien qu’elle se tienne au courant des dernières nouveautés, déjà qu’elle était coincée dans ce bled, loin de tout !).
Elle allait inventer une petite histoire comme quoi elle avait vu ces charmants jeunes hommes il y avait à peine quelques secondes, quand Kajila la devança.
Pour la troisième fois, Raya dut faire un effort surhumain –au moins ! – pour se contrôler. Mais qu’est-ce qui la retenait, concrètement, d’étrangler cette dinde ? Sa fierté, bien sûr. On ne touche pas les êtres inférieurs !
Quelle qu’ait été sa volonté, la jeune enseignante ne put se retenir de laisser transparaître une once d’ironie dans sa réponse.

Oh, mais elle vous aidera avec plaisir, c’est demandé si gentiment !

Puis elle ajouta, en regardant le médecin de tout ses yeux noisettes étincelants :

Si je peux vous aider, ce sera avec grand plaisir, Monsieur Soma. Je ferai n’importe quoi pour vous être agréable !

Raya rougit légèrement (un chef d’œuvre, plus vrai que nature) comme si elle avait un peu honte de son « enthousiasme », avant de baisser les yeux pour ajouter plus sobrement:

Je peux vous obtenir cette annonce si cela vous arrange.

Même si elle avait du mal à retenir sa colère, cette conversation l’amusait follement. Voilà bien longtemps qu’elle n’avait pas joué un rôle aussi parfait !

Hatori eut chaud au cœur en voyant le magnifique sourire qu’arborait Kajila. Cela lui faisait plaisir de constater qu’il arrivait encore parfois à provoquer ce genre de réaction. Lui qui pensait n’être bon qu’à faire souffrir ceux qui le côtoyaient…
Le murmure de la jeune fille à propos de sa professeur le désarçonna quelque peu. Sur ce coup-là, il la trouvait inutilement hostile. Après tout, la professeur n’avait rien dit de provocateur, ou en tout cas pas de quoi faire une remarque dans ce genre ! Le médecin fronça légèrement les sourcils en regardant Kajila, puis reporta son attention sur la jeune femme qui leur demandait comment ils s’étaient connus.
Rien d’étonnant à ce qu’ils ne se ressemblent pas, en tout cas, ils étaient des parents si éloignés qu’il se demandait jusqu’où il fallait remonter pour leur trouver un ascendant commun.
Encore une fois, la réplique de Ryu le prit par surprise. Il se demandait la raison d’une telle animosité, après tout Ayunoka-sensei avait l’air tout à fait inoffensive, elle venait même de s’excuser !… même s’il doutait de la vraisemblance de cette humilité, il ne pouvait l’ignorer.

Ce n’est rien, votre curiosité est légitime.

Un professeur avait tout de même le droit de savoir qui ses élèves fréquentaient, surtout si ces personnes se retrouvaient face à lui ! Vraiment, il ne parvenait pas à comprendre la réaction de la lycéenne. Il lui lança un regard interrogateur teinté de reproche informulé.
Encore un peu troublé par cette réponse agressive, il ne répondit pas tout de suite à l’adolescente qui lui avait adressé la parole en ignorant totalement l’enseignante. Il soupira en écoutant ce qu’elle disait. Il n’avait pas envie de parcourir le lycée du toit jusqu’aux toilettes, en passant par il ne savait quel fan club et leurs salles de classes pour les retrouver non plus !

Merci, mais je vais me débrouiller, je ne veux pas vous faire manquer vos cours.

Le médecin avait parlé de cette même voix blasée qu’il avait pour tous, sauf pour quelques rares privilégiés dont Kajila faisait parfois partie. De toute façon, en présence d’une inconnue, il était hors de question qu’il montre le moindre de ses sentiments.
Une annonce dans le micro ? Hatori aurait préféré quelque chose de plus discret, mais il n’avait pas de temps à perdre… Une fois de plus, il ne comprit pas le mépris que manifestait Kajila envers la jeune professeur. Celle-ci ne l’avait pourtant agressée d’aucune manière ! Et la lycéenne ne cherchait même plus à conserver le minimum de respect qu’elle devait à n’importe quel enseignant. C’était son aspect formel qui le poussait à prendre la défense de la jeune femme, ou en tout cas à montrer un peu moins de froideur que d’ordinaire.
Il jeta encore un coup d’œil réprobateur à Ryu, avant de regarder Raya pour savoir comment elle allait réagir.
La jeune femme fut vexée comme il fallait s’y attendre, toutefois elle sembla bien vite oublier Kajila pour répondre au médecin qui, surpris de son enthousiasme, eut un mouvement de recul. Il haussa les sourcils devant ses paroles, embarrassé, puis s’éclaircit la gorge.

Hum, inutile de vous mettre en quatre pour une affaire aussi insignifiante. Au pire, je pourrai remettre ce que j’ai à leur donner à quelqu’un qui les verra avant ce midi. Nul besoin de prévenir tout le monde en utilisant le micro du lycée…

Puis il rajouta, vaguement reconnaissant tout de même :

Mais je vous remercie de votre proposition.

Enfin, il regarda Kajila, n’osant lui demander ce service. Il préférait qu’elle se propose, il ne voulait pas lui infliger une corvée ainsi, en ayant l’air de profiter d’elle. D’autant qu’étant donné le nom impersonnel qu’elle avait employé pour désigné Kyo, et le ton avec lequel elle avait parlé de leurs « fan-club », il avait l’impression qu’elle ne s’entendait pas à merveille avec eux.

Tout le monde ne se ressemble pas autant que vous et votre frère.

Lanca tranquillement la jeune fille, blessée, elle ne savait d'ailleurs pourquoi, de la remarque du professeur. Elle aurait bien aimé avoir recu le "gêne de beauté" des somas. Peut-être que si elle avait ete plus belle, on l'aurait plus remarquée.
Enfin bref, à peine avait elle parlé qu'elle se le reprocha. Cette connaissance etait un secret qu'elle avait surprit. Elle n'etait pas sensée le savoir, et gaspiller une carte pareille juste pour une remarque qui avit touché juste etait stupide. Elle ne faisait que des erreurs de debutante aujourd'hui !

C'est alors qu'elle appercu le regard de reproche d'Hatori. Alors il tombit dans le piege, plutot grossier, que lui avit tendu le professeur ? Il croyait a la professeur si gentille, si douce et si indulgente et à l'eleve odieuse ? Il la connaissait donc si mal ?
Elle lui repondit par un regard triste mais teinté de reproche. Il aurait du lui faire au moins assez confiance pour comprendre qu'elle n'aurait pas agit comme cela sans raisons !

Desarsonnée, elle ne pipa plus mot de la conversation, sentant le regard du medecin a chaquefois qu'une idée de réplique lui traversait l'esprit. Elle savait bien qu'il ne la regardait pas autant mais l'impression etait la. Hatori etait l'un des rares adultes qui pouvaient la faire obeir d'un mot, d'un regard, d'un geste.

C'est donc d'un ton presque soumis, sans aucune idée de provocation qu'elle repondit.

Oh, oui, j'avais oublié. En fait je vous cherchais Ayunoka-sensei. Les autres m'ont envoyé voir si nous avions cour. Comme vous n'arriviez pas....

Elle se tut pour ne pas avoir à ajouter autre chose. Elle ne voulait pas la provoquer d'avantage puisqu'Hatori semblait souhaiter qu'elle se comporte bien. Controlant avec difficulté sa colere, baissant les yeux pour la dissimuler sans se rendre compte que ses bras et ses epaules tremblaient sous l'effort.

Un silence plana. C'est seulement alors que la jeune fille se rendit compte que les "adultes" avaient arrêté de parler. il y eut un autre moment, le temps qu'il fallut a kaj pour se rememorer la conversation qu'elle n'avait pas suivi. Comprennant enfin le regard du dragon, elle leva ses yeux francs vers lui.

D'accord, je vais le faire. Qu'est ce que je dois leur donner ?

Elle esperait que le prince n'etait pas seul, sinon, elle aurait encore a supporter les hysteriques pendant trois plombes pour lui avoir parlé et même lui avoir donné un cadeau...

En tout cas, elle se proposait de bon coeur. Aussi curieux que cela puisse paraitre, aider Hatori etait important pour elle.
Maintenant, tout ce qu'elle esperait etait que ce petit jeu se termine vite et qu'elle puisse s'enfuir en courant, decharger sa frustration sur le puching ball du gymnase.
Son ventre se mit a gargouiller, et Kajila rougit. Elle avait faim. Encore une fois elle n'avait pas mangé, preferant s'acheter un livre (elle savait qu'elle n'etait pas raisonnable). Mais bon, elle allait dejeuner avec un onigiri. Cela luis uffirait bien.

Raya foudroya la lycéenne du regard. Elle détestait qu’on lui rappelle son lien de parenté avec Shouta, qui était professeur de mathématiques dans ce même lycée. Elle se demandait ce qu’il pouvait d’ailleurs bien enseigner ; à part rouler un pétard, Fukuda n’était pas bon à grand-chose. Tout ce qu’il pouvait apprendre à des élèves qui s’approchait le plus des maths, c’était à compter ses barettes de shit. Non mais vraiment !…
Pourtant, la jeune femme prit une fois de plus sur elle-même pour exhiber un sourire douloureux et peu convaincant : elle était la plupart du temps capable de rester de marbre, mais dès qu’il s’agissait de Shouta elle avait énormément de mal à garder son sang-froid.

Fukuda Shouta n’est que mon demi frère, et j’insiste sur le fait que nos caractères sont aussi éloignés que notre lien de parenté.

La jeune femme intercepta alors l’œillade réprobatrice que le médecin adressait à Ryu. Raya était ravie : apparemment son petit jeu de scène avait fait merveille. Hatori semblait convaincu qu’il avait affaire à une professeur indulgente et aimable. C’était vraiment amusant !… Il était si facile d’abuser les gens, dans ce monde… Pour un peu, elle aurait éclaté de rire.
La jeune femme ne put s’empêcher d’adresser un sourire carnassier et triomphant à Kajila tandis qu’Hatori Soma détournait la tête. La tentation était bien trop forte, après toutes ces provocations ! Raya jubilait, et faisait un effort surhumain pour ne rien laisser paraître. Il fallait admettre qu’elle y arrivait plutôt bien…
La maintenance de son masque de gentil prof fut d’ailleurs mise à rude épreuve quand elle entendit le ton soumis que prenait Kajila pour répondre au Soma. Elle dut baisser la tête, dissimulant ainsi son visage de ses longs cheveux, pour faire disparaître le sourire vainqueur qui refusait de quitter ses lèvres. Quand elle releva le menton, ce fut pour répondre d’une voix tout à fait maîtrisée.

C’est vrai, j’ai été mise en retard par la photocopieuse qui refusait de fonctionner correctement. Et j’avais absolument besoin de faire des copies pour ce cours-ci, nous avons déjà un peu de retard…

Dire qu’elle avait un peu de retard sur le programme était un euphémisme. En fait, elle ne savait même pas ce qu’il y avait au programme, elle se contentait de donner les exercices les plus difficiles qu’elle trouvait dans le livre de cours pour avoir la paix. Quant à la photocopieuse, Raya ne l’avait jamais approchée, de près ou de loin ; elle était en retard simplement parce qu’elle était en train de se remaquiller alors qu’elle avait un cours à donner.

Malheureusement, alors que j’y étais enfin parvenue et que je me dirigeais vers ma classe, une certaine jeune fille a fait glisser un objet auquel je tenais beaucoup sous ces casiers, mettant une fois de plus ma ponctualité à rude épreuve…

La jeune femme avait prononcé cette phrase du ton amusé du professeur bienveillant qui pardonne tout à ses élèves adorés.
Hatori semblait gêné de les importuner à présent. La jeune femme le regarda de son air le plus innocent et le plus charmant pour lui répondre.

Je vous en prie, c’est bien la moindre des choses.

Kajila, qui depuis un moment l’avait mis en veilleuse (au plus grand plaisir de la jeune femme) se proposa alors pour lui rendre service. Raya eut un léger froncement de sourcil ; elle réfléchissait au moyen de la contrarier. Puis seulement elle intervint en se raclant la gorge pour attirer l’attention sur elle. Son ton était chagriné, comme si cela l’ennuyait de jouer les rabat-joie (alors qu’en fait elle adorait ça !).

Hum, Kajila, je suis désolée, mais ce n’est pas possible ! Vous devez absolument suivre mon cours, vu votre niveau, et après je vous rappelle que vous avez des heures de colle durant tout votre temps libre…

Puis elle se tourna vers le médecin et prit un air timide et serviable.

Mais si vous voulez, je peux le faire, je n’ai aucun cours entre midi et deux heures…

Hatori se demandait à présent s’il n’en avait pas trop fait. Bien sûr, il n’aimait pas que l’on manque de respect aux gens, mais cela ressemblait si peu à Ryu de prendre cet air résigné en regardant par terre…
Il l’observa un moment pendant qu’elle répondait (tout à fait correctement cette fois) à son professeur, puis fronça les sourcils en voyant qu’elle tremblait. Durant un horrible moment, il crut qu’elle allait pleurer, puis il réalisa la stupidité de sa pensée en la voyant relever la tête, les yeux parfaitement secs. Comment avait-il pu penser que sa fierté lui permette de fondre en larme pour un simple regard de reproches, devant deux adultes ? Enfin ? il espérait tout de même ne pas l’avoir blessée…
Quant à Ayunoka-sensei, elle commença de justifier son retard par il ne savait quel problème ; Hatori décrocha à ce moment-là de la conversation, sans se rendre compte qu’il faisait la même chose que Kajila.
Il écouta donc distraitement, notant au passage que cette prof studieuse avait l’air bien inoffensive –pourquoi donc la lycéenne l’avait-elle dans le nez ?- ; puis il fronça à nouveau les sourcils.
L’enseignante venait clairement d’annoncer que Kajila l’avait provoquée. Sans penser une seconde que la jeune femme pouvait mentir, étant donné son ton tranquille et généreux, il regarda Ryu avec étonnement. Il ne comprenait pas pourquoi elle avait bien pu faire ça ! Cette animosité complètement injustifiée à ses yeux était similaire à celle que la jeune fille portait à Kana. Le médecin ne pouvait pas comprendre cela, pourquoi était-elle aussi franchement hostile et méprisante avec ces personnes ? Il haussa un sourcil, son regard se teinta de regret.
Puis la lycéenne lui proposa, comme il l’avait espéré, de faire sa commission. Comment pouvait-elle être aussi gentille et serviable avec certains, et aussi désagréable avec d’autres ? Etait-elle ainsi avec tout le monde ? C’était lui le cas particulier, ou les deux femmes ? A bien y réfléchir, le médecin l’avait rarement rencontrée en présence d’autres personnes…
C’est alors que la prof lui rappela qu’elle avait un cours et des heures de colle. Une fois encore, le Dragon lui jeta un regard profondément surpris, et un peu déçu. Elle avait des difficultés en cours ? Pourtant elle était brillante en matière de médecine, l’homme en avait eu la preuve une fois, alors qu’il discutaient du cas de Mia Shetowa, une malade qu’il était censé l’aider à soigner. Bien plus calée que la moyenne pour son âge.
Et elle avait reçu une punition ? Le médecin n’était même pas sûr de vouloir savoir pour quelle raison…
Il intervint avec empressement, en regardant toujours Kajila, un peu gêné, mais sincère.

Kajila, je ne veux surtout pas interférer avec vos… activités scolaires. Je vous remercie vraiment de m’avoir proposé votre aide, mais il est hors de questions pour moi de vous attirer des ennuis en vous faisant accomplir mes corvées. Ne vous inquiétez pas, je me débrouillerai…

Le docteur était vraiment surpris par ce qu’il croyait avoir découvert sur l’adolescente, mais cela n’empêchait pas le fait qu’il la trouve toujours adorable, ou qu’il lui soit reconnaissant. Toutefois les paroles d’Ayunoka-sensei gouttaient dans son esprit comme du venin, et faisait naître une multitude de questions sans réponses.
Enfin, en attendant, c’était lui qui allait devoir arpenter le lycée pour remettre leurs déjeuners à ces deux imbéciles. Cela le fatiguait d’avance. Il allait devoir questionner un millier de personnes, subir leurs gloussements et leurs papotages, pour enfin les retrouver, évidemment là où il s’y attendrait le moins, et leur donner leur repas en se rendant compte qu’ils avaient déjà mangé ! Avec la chance qu’il avait, cela pouvait tout à fait se produire. Soupirant d’avance de devoir fouiller l’établissement, il releva la tête à l’offre de l’enseignante.
Il fut réellement embarrassé lorsqu’il répondit. Il ne trouvait pas cela pareil de confier cela à Raya Ayunoka plutôt qu’à Ryu. Peut être parce qu’il connaissait mieux cette dernière ?… Toujours est-il qu’il répondit en hésitant.

Eh, bien, je… C’est réellement aimable de votre part, je vous remercie beaucoup, mais il serait impoli de ma part de profiter de votre gentillesse et de votre disponibilité. J'imagine que vous aviez prévu de faire autre chose. Je pense que je vais me débrouiller tout seul.

Ayant un « trou » d’une heure dans son emploi du temps et n’ayant pas de copies à corriger, Mayuko avait décidé de faire un petit tour d’inspection, histoire de coincer les élèves faisant l’école buissonnière. Elle était en train d’arpenter les couloirs du rez de chaussée lorsque un de ses collègues lui signala que la classe de Ayunoka-sensei était sans professeur. Il lui fut donc demandé de remplacer sa collègue en attendant son retour. Elle était en route pour la classe en question lorsque son attention fut attirée par des éclats de voix. Ces dernières semblaient provenir des casiers à chaussures. Intriguée, elle bifurqua dans cette direction. Elle tomba alors nez à nez avec un étrange spectacle.

Elle reconnut instantanément Kajila pour avoir eu des mots avec la jeune fille et se demanda ce qu’elle faisait là au lieu d’être en cours. Ensuite, son regard fut attiré par une silhouette familière. Quelle ne fut pas sa surprise d’y reconnaître Hatori Soma. Que diable venait-il faire ici ? Mais elle n’eut pas le temps de s’éterniser sur la question que déjà une voix la ramenait sur terre. Ses yeux s’arrêtèrent sur une femme en train de minauder devant SON Hatori. Agacée, Mayuko le fut encore plus quand elle réalisa que la femme en question était Raya. Elle approcha du groupe sans bruit et stoppa derrière le médecin.

Ah vous voilà, Ayunoka-san ! J’étais en route pour vous remplacer au pied levé mais maintenant que je vous ais trouvée, vous allez pouvoir vous rendre en cours. D’ailleurs à ce sujet, il est plutôt déplacé de votre part de négliger votre travail. Vous ne montrez pas le bon exemple aux élèves !

Puis elle se tourna vers Kajila.

Quant à vous, jeune demoiselle, regagnez immédiatement votre classe ! Vous êtes déjà bien assez en retard comme ça. Vous viendrez me voir à la fin des cours pour me donner votre explication.

Enfin, elle daigna regarder l’hippocampe. C’était la première fois qu’elle le revoyait depuis qu’elle lui avait avouer ses sentiments et s’être pris un râteau mémorable. Elle était un peu mal à l’aise et tenta de rien en laisser paraître.

Bien le bonjour, Hatori-san. Que venez-vous faire ici ? Yuki est-il malade ? Ou est-ce Shiguré qui vous envoie ?

Kajila, interieurement, fremissait, bouillait de colère, de tristesse et de frustration. Qu'Hatori croit tout ce que disait cette pimbeche hypocrite la depassait completement. Ces mines auraient été tellement risible si elles avaient ete adressées a quelqu'un d'autre !
Aussi lorsque Raya l'attaqua sur son niveau, elle ne put plus se contenir. Elle releva la tête, ses yeux sombre brillant de colere, les pomettes rouges, les sourcils froncés, les points serrés, et son sourire plus ironnique que jamais, presque mauvais.

Mon niveau se porte à merveille, Mademoiselle, mais je vous remercie de vous en inquieter.

Fit elle en francais, sans aucune faute, utilisant des tournures bien au dessus de ce que l'on demandait à un élève de terminale lambda.
Elle parlait bien le francais. En fait elle était excellente dans toutes les matières, ayant facilement deux ans d'avances et ne restant au lycée que pour profiter de sa bourse.
Puis, toujours furieuse, elle foudroya Hatori du regard et lui répondit d'une voix plate qui contrastait avec l'expression de son visage (et en japonais cette fois).

Je vous assure qu'il n'en est rien, je n'ai aucun cours à l'heure du déjeuner et les punitions se font toujours en fin de journée. J'aurais donc tout le loisir de vous aider.

Elle haussa les epaules et detourna le regard.

Néanmoins j'ai d'autres choses a faire également alors si vous ne voulez pas, je ne vais pas insister.

Bon c'était peut-être un peu rude, mais elle était fachée, et faisait son mieux pour ne pas exploser et casser la figure de Raya.
C'est alors que, cerise sur le gâteau, Makura-senseï apparut et lui reprocha de ne pas être en cours.
Elle prit soin de lui répondre avec toute la politesse qu'Hatori pouvait exiger d'une élève envers son professeur, et malgré les eclairs de ses yeux, retorqua simplement.

Bonjour, Shiraki-senseï. Je m'excuse de traîner ainsi dans les couloirs pendant les heures de cours, mais, en tant que déléguée, les autres m'ont envoyé trouver notre professeur de français, Ayunoka-senseï pour savoir si nous avions, ou non, cours aujourd'hui. Son absence d'hier, malgré sa présence dans l'établissement nous perturbant quelque peu.

Elle haussa les epaules et sourit de plus belle, ses yeux petillant froidement au plaisir de voir la vérité la servir elle, pour une fois. Elle ne savait pas si Hatori allait la croire, et elle s'en fichait presque, elle etait en colere, plus en colere qu'elle ne l'avait été depuis que le soleil c'etait à nouveau levé pour elle. Même le dragon allait devoir en subir les conséquences pendant un sacré bout de temps !
Elle jeta un coup d'oeil peiné au médecin et repartit à l'attaque.

Mais tout est réglé, puisqu'Ayunoka-sensei vient de se rendre compte que la photocopieuse est en panne depuis 3 semaines.

Elle replaca une mèche de cheveux derriere son oreille distraitement. La mèche, trop courte, repris immédiatement sa place favorite devant les yeux de la lycéenne qui ne s'en soucia pas.. Ses yeux se remirent à petiller d'amusement et de bonne humeur (bien qu'elle soit toujours en colère au fond), son sourire redevint celui qu'elle arborait habituellement, ses mains se joignirent derriere son dos.

Raya eut un immense sourire réjoui devant la mine contrariée de Kajila. C’était tellement facile !…

C’est parfait, mademoiselle, je vous félicite ! Comme quoi, les quelques dizaines d’heures de cours de rattrapage que je vous ai dispensées gratuitement ont fini par payer !

C’était dit d’un air sincèrement heureux, tout à fait serein. Un travail de maître. La jeune femme se retint de pouffer en voyant qu’elle avait réussi à fâcher le Soma et la jeune fille. Histoire d’en rajouter un peu, elle se pencha vers la lycéenne, prit un air désolé et eut un murmure parfaitement audible pour le médecin.

Ecoutez, Kajila, je peux déplacer votre punition si cela vous arrange… Vous avez l’air de tenir sincèrement à aider ce monsieur, j’imagine que vous êtes très proches…

Raya était en pleine contemplation devant sa prochaine victime, un magnifique sourire aux lèvres… sourire qui s’effaça aussitôt qu’elle entendit Mayuko Shiraki. Tiens, elle connaissait Hatori? La jeune femme fronça les sourcils et mit les mains sur les hanches, avant de toiser la nouvelle venue avec mépris. Quelle emmerdeuse, celle-là ! « Le bon exemple », non, mais, comme s’il était possible d’enseigner quoi que ce soit à ces, ces… ces singes ! Tous des imbéciles ! Et puis, elle faisait déjà l’effort de venir au lycée, il ne fallait pas non plus lui demander de travailler tout le temps ! Elle était fragile, et puis surtout elle avait ses principes quand même !
Non, vraiment, pour le peu qu’elle la connaissait, Raya n’aimait pas Mayuko. Toujours à la rappeler à l’ordre, à lui parler comme à une souillon alors qu’elle n’était qu’une misérable et pathétique prof ! Elle-même était issue d’une bonne famille, on ne la traitait pas comme la moindre des pauvresses …
Mais Hatori était là. Si elle voulait entretenir son image de gentille dadame, mieux valait éviter de la rembarrer trop méchamment… Elle se composa donc un (très) douloureux sourire merveilleusement hypocrite.

Voyons, Shiraki-san, vous pouvez m’accuser de tout ce que vous voulez, mais pas de négliger mon travail ! Je fais beaucoup d’efforts pour m’occuper au mieux des élèves… pendant que d’autres se donnent du bon temps avec leurs collègues…

La référence à la relation de Shouta avec Mayuko était évidente pour tout le monde, sauf pour Hatori (ou du moins elle l’espérait) et c’était tout ce qui comptait.

J’étais seulement partie faire des photocopies pour mon cours … puis j’ai croisé cette jeune fille qui m’a encore fait perdre du temps avec des gamineries… et ce monsieur qui recherche Kyo et Yuki Soma, il me semble.

Elle sourit gentiment à l’intéressé, avant de se passionner pour ses ongles, en notant aussitôt qu’il serait temps de renouveler sa manucure – tiens, oui, cela faisait un moment qu’elle n’était pas allée chez l’esthéticienne…quoique, elle hésitait, elle ne supportait pas la nouvelle, cette petite pimbêche qui se croyait tout permis !…Cette fille lui rappela Kajila, et elle daigna alors se réintéresser à la conversation.

J’ai pourtant signalée cette absence à l’administration, mademoiselle ! s’exclama-t-elle avec un air choqué.
J’étais en rendez-vous avec le père d’un de mes élèves qui pose certains problèmes non négligeables, et ce brave homme ne pouvait pas se libérer à un autre moment de la journée… J’ai pensé que ce problème était plus important qu’une heure de cours que je rattraperai plus tard de toute façon ! Ai-je eu tort ?

Pas mal pour une invention immédiate. Et puis c’était presque vrai, elle avait réellement discuté avec un homme dans l’enceinte de l’établissement à ce moment-là, mais c’était un très séduisant jardinier, et ils n’avaient pas vraiment parlé des élèves du lycée…
Raya fixait tour à tour Mayuko et Kajila, les défiant de mettre ses paroles en doute.
Puis son regard se recentra sur Kajila qui la provoquait une fois de plus. Raya eut une grimace à son attention, à mi-chemin entre le dégoût et la pitié. En gros : « ma pauvre fille, c’est tout ce que tu as trouvé ? Tu ne vaux même plus la peine que je te répondes… »
L'ensignante secoua alors la main d'un air désinvolte et se retourna vers Hatori et Mayuko avec un sourire éblouissant.

Ceci dit, j'imagine que nos petits problèmes de cours ne vous intéressent guère, Monsieur Soma, je suis désolée... Mais... vous connaissez Shiraki-san?

L’arrivée de Mayuko prit Hatori complètement au dépourvu. Il se retourna, surpris, en entendant sa voix derrière lui. Quel imbécile, il savait bien qu’elle travaillait ici, pourtant ! Troublé, gêné, il resta muet quelques secondes avant de lui répondre. Cela faisait si longtemps qu’il ne l’avait pas vue ! Depuis qu’il l’avait repoussée en fait… Il se rappela alors la visite de son ami, le professeur Toyimi, et se souvint de ses mises en garde. Peut être avait-il été trop dur… Il ne se rendait plus tellement compte de ce genre de choses. Il s’était cloîtré dans une coquille qui protégeait ses sentiments, mais qui l’empêchait de voir ceux des autres. En prendre conscience le mettait terriblement mal à l’aise…
Et puis, elle ne le vouvoyait pas, avant… Cette distance entre eux, c’était lui qui l’avait installée, alors pourquoi est-ce qu’elle le surprenait autant ?
L’intervention de la jeune femme lui rappela la raison de sa visite ; il n’avait que trop perdu de temps.

Bonjour, Mayuko-san. J’étais venu donner quelque chose à Yuki et Kyo.

Il avait parlé d’un ton neutre, comme à son habitude, le visage toujours aussi fermé, avec peut être une pointe d’inquiétude que l’on pouvait déceler dans ses yeux. Il aurait voulu parler à Mauko, à propos de ses soi-disant problèmes, mais il ne savait absolument pas comment s’y prendre, et puis c’était totalement exclu en présence de Kajila et Raya.
Le maudit, perdu dans ses pensées, zappa complètement le duel Raya- Ryu. Il ne savait plus laquelle croire de toute façon, et il en avait assez d’essayer de comprendre un tant soi peu ce qui se passait ici. Cependant, la réplique de Kajila lui fit un peu l’effet d’une gifle. Il l’avait encore blessée…
Oh, et puis zut. Ras le bol. Il ne comprenait rien, il ne savait plus qui croire, ça commençait à bien faire ! Le Dragon passa sa main sur son front, puis soupira, les sourcils froncés. Impossible de démêler le vrai du faux dans cette conversation ! Raya Ayunoka avait l’air d’être une femme très gentille, mais il ne savait rien d’elle, il n’était pas forcé de a croire sur parole. A y réfléchir, il avait plus confiance en Ryu, ou en Mayuko…
Bon. Dans ce cas là, une seule solution, l’esquive. L’hippocampe allait s’excuser de devoir partir quand la jeune professeur lui adressa la parole.

Hein, euh, oui, nous… nous nous connaissons depuis plusieurs années…

Il n’était pas disposé à en dire plus. Leur rencontre lui rappelait des souvenirs si doux, si amers, si douloureux…

Bien, je suis navré de vous avoir fait perdre du temps à toutes. J’ai beaucoup de choses à faire, et je dois vous laisser.

Il s’inclina légèrement devant la professeur et la lycéenne, en lançant à cette dernière un regard d’excuse.

Au revoir.

Puis il se tourna vers Mayuko et lui donna les paquets.

Si tu… si vous pouviez donner ça aux garçons…ils sont dans votre classe, non ?

Cela le gênait de lui refiler cette corvée, mais c’était le seul prétexte qu’il avait trouvé pour se rapprocher suffisamment d’elle et lui murmurer :

J’aimerais te parler… ailleurs, et plus tard.

Puis il recula, s’inclina, et s’éloigna rapidement dans la foule qui emplissait le couloir. Une foule de regrets et de déterminations nouvelles l’assaillaient. Comment avait-il pu blesser autant Mayuko sans en prendre conscience ? Il avait voulu s’éloigner des autres pour ne plus jamais faire souffrir personne, et c’était exactement le contraire qui arrivait.

Mayuko fit un signe de la main à l’adresse de raya sans pour autant quitter des yeux Hatori. Signe qui voulait dire « c’est bien, je vous crois, rejoignez donc votre classe ! ». Elle le regarda saluer les deux jeunes femmes avant de lui fourguer dans les mains, deux paquets au contenu mystérieux !

En effet, ils sont dans ma classe…

Elle n’eut pas le loisir de continuer que déjà le médecin poursuivait à mi-voix. Les paroles qui parvinrent alors à ses oreilles la touchèrent bien plus qu’elle ne l’aurait cru. Elle rougit légèrement sans trop savoir pourquoi d’ailleurs. N’avait-il pas dit clairement qu’elle ne représentait rien pour lui. Alors pourquoi réagissait-elle ainsi ? Elle se traita mentalement d’idiote et se reprit très vite.

Bi…bien. Comme tu veux. Tu sais où me trouver.

Bredouilla-t-elle avant de détourner la tête rapidement pour cacher sa rougeur naissante. Puis elle se rappela de la présence de Raya et Kajila et reporta son attention sur elles deux.

Bien puisque vous êtes là, Ayunoka-san, je vais pouvoir enfin rentrer chez moi !

Et elle tourna les talons en direction de la salle des professeurs afin de récupérer ses affaires et quitter enfin le lycée !

Entre Raya qui continuait ses médisances, l'arrivée de Mayuko et Hatori qui se mettait à ne plus avoir d'yeux que pour cette dernière, Kajila etait completement dépassée. En colère, triste, blessée, jalouse, elle se sentait submergée par ses emotions, chose qu'elle évitait la plupart du temps. Elle aurait voulu se mettre à pleurer, s'enfuir loin de ces gens qui la blessaient, loin d'Hatori, loin de tout. Elle eut envie de disparaitre, de ne plus exister, de se faire oublier simplement. Seulement elle etait bien trop fière pour cela, avouer ses faiblesses devant Hatori oui, devant Mayuko à la rigueur, malgré leur sempiternel duel, elle considerait le professeur un peu comme sa grande soeur, quelqu'un qu'on souhaitre dépasser mais qu'on admire malgré tout, mais surement pas Raya qu'elle detestait. Ses yeux etaient donc toujours secs, ses sourcils froncés et ses poings serrés. Hatori avait raison, il l'avait blesée, durement, mais elle allait s'en remettre.

Elle fusilla les trois adultes du regard et fini par hocher la tête.

Bien, je vais prévenir les autres que l'on va peut-être avoir 10 minutes de cours tout compte fait, s'ils m'attendent encore.

Elle s'inclina devant Mayuko, Raya, puis marqua un temps devant Hatori.

Aligato, Hatori-sama.

Il y avait un rien d'ironie dans cette derniere phrase. Pourtant c'etait par cette formule qu'elle le saluait à chaque fois. Sans s'attarder, elle fit demi tour et partit calmement vers la salle de classe. Personne ne la prendrait en défaut dans ce lycée stupide. Elle etait Kajila, la dragonne et ce n'etait pas trois adultes qui allaient la mettre à terre ! Ils allaient voir !