Promenade nocturne

Il etait tard et la nuit etait tombée mais Kajila se sentait toujours d'attaque ! Pourtant apres une journée de travail au lycée plus de la lecture pour la fac au parc et 4h de vélo a livrer des plats il y avait de quoi être légèrement trahie par la fatigue !
Enfin elle allait pouvoir se reposer, une derniere course assez loin et retour a la maison jusqu'a demain !
Malheureusement sa derniere livraison etait au diable. On ne pouvait même plus appeler cela la ville, et le temps de livrer, de se faire payer, de discuter un peu avec le client pour qu'il revienne et son heure habituelle de retour etait passée.
Pressée de regagner ses pénates, la jeune fille pédalait avec force et assurance. Pas la peine de faire trop attention, il n'y avait personne a ces heures là dans ce quartier la !
Quand soudain, un obstacle se dressait droit devant elle en la personne d'une silhouette traversant le chemin sans bien regarder...en tout cas sans la voir.
Kaj se mit a reflechir a toute allure tandit que le vélo devalait la pente, elle ne pouvait l'eviter, ni a gauche, ni a droite a cause des arbres qui bordaient la route et risquaient de demolir son outil de travail, quand a freiner brusquement...etant donné la vitesse elle risquait de passer par dessus son velo et de tomber sur le type. Or quitte a se faire mal autant le faire tout seul !
Elle fit donc la seule chose a laquelle elle put penser. Elle freina avec le frein arriere et changea sa position pour tomber sur le dos, expres.

Elle s'attendait au choc mais celui-ci n'en fut pas moins douloureux. Elle tomba sur le flanc, son vélo toujours entre les jambes (surtout ne pas le casser, elle y tenait beaucoup) et derapa un moment sur les graviers avant que le frottement ne la freine a quelques pas a peine de l'inconnu.
Un peu sonnée elle lacha la bicyclette et s'assit sur le sol pour faire l'inventaire des degats. Elle s'etait écorchée du coude jusqu'au poignet et sa cheville lui faisait mal. Elle ne pensait pas se l'être foulée heureusement et elle decida que d'ici 10 minutes tout irait bien ! Elle aurait vraiment pu se faire plus mal que cela.
Oh, bien sur elle pestait intérieurement sur sa tunique déchirée, ses futurs bleus sur le flanc, ses ecorchures, sa cheville et une rayure sur son vieux vélo mais rien de tout cela n'etait bien grave.

"L'accident" malgré son coté intemporel pour la lycéenne n'avait a peine duré quelques instants et la silhouette etait toujours la. D'une voix plus forte et plus assurée que ce qu'elle ressentait, Kajila demanda :

"Vous n'avez rien M'sieur ? !"

(HJ le "monsieur" en question, pour ceux qui auraient pas deviné, c'est Hatori-san ^_^)

Profitant qu'Akito s'était endormi de bonne heure et que pour une fois il n'y avait pas trop de malades chez les Soma, Hatori s'était accordé une soirée de détente chez Shigure. Certes il avait dû lui mettre la bride pour ne pas le laisser partir dans ses grandes envolées lyriques ou dans ses sous-entendus déplorables, mais il avait apprécié sa compagnie, regrettant presque qu'Ayame n'ait pas pu venir pour compléter le trio et partager le sake. Ils avaient parlé de choses et d'autres, de la présence de Tohru et de ses effets sur Kyô et Yuki notamment. Mais toutes les bonnes choses ont une fin et à la nuit tombée, il salua poliment la maisonnée avant de se retirer en toute discrétion pendant que Shigure s'amusait à pleurer et à hurler sa douleur de le voir partir. Hatori ne se retourna même pas, trop pressé de s'éloigner de ce clown!

Il remonta le chemin et s'engagea sur un petit sentier de gravier menant un peu plus loin à la route et à sa voiture. La nuit était claire et la lune illuminait le sentier. En dehors, sous les arbres, les ténèbres régnaient. Les grillons s'y étaient réfugiés et chantaient sans se lasser en frottant leurs pattes arrières l'une contre l'autre. Quelques lucioles vinrent aussi danser devant lui. Il n'y avait pas à dire, ils habitaient vraiment loin de tout!
Hatori continua d'avancer du même pas tranquille, respirant à pleins poumons l'air frais de la nuit, chargé des senteurs des arbres bordant le sentier.

Mais la sérennité de la scène fut soudain interrompue par un bruit de dérapage sur les graviers derrière lui. Le médecin vit alors une jeune fille tomber de vélo (il était loin d'avoir compris qu'elle l'avait fait pour ne pas le percuter... il en aurait fait une syncope sinon!) et glisser sur plusieurs mètres sur le gravier. Elle s'arrêta juste à côté de lui et se rassit tranquillement. Hatori fit rapidement l'inventaire des dégâts lui aussi, s'attardant plus longuement sur cette cheville qui semblait lui faire mal. Tout ceci ne prit que très peu de temps, il était toujours rapide dans ses diagnostics. Malgré les risques de transformation, il s'agenouilla tranquillement devant elle et tâta la cheville de Kajila pour s'assurer du degré de la blessure. La jeune fille lui demanda alors s'il allait bien. Hatori leva ses yeux verts, les sourcils haussés de surprise, vers elle.

"Ce n'est pas moi qui suis tombé. Cela serait à moi de vous poser la question!... En tout cas, votre cheville n'est pas cassée mais vous vous êtes méchamment égratignée... Comment vous sentez-vous?" s'enquit-il d'une voix calme.

L'inconnu ne resta pas longtemps surpris et arriva rapidement aux cotés de Kaj. La jeune fille s'attendait a ce qu'il lui tende la main pour qu'elle se releve mais au lieu de cela, il lui prit la cheville pour la lui examiner. En tant que fille de médecin elle savait en reconnaitre un quand elle le rencontrait et cet homme faisait visiblement partie de l'Ordre. Etonnée elle le regarda. La surprise la fit frissonner. Cette silhouette élégante, cette voix, grave, calme, posée qui parraissait si froide et qui pourtant lui était si douce, ces mains blanches et surtout ces deux magnifiques yeux verts, tristes et ternes, comment ne pas le reconnaitre ?!
Hatori avait l'air étonné, mais la plus surprise des deux etait bien Kajila ! Pourtant...elle s'en voulait un peu de ne pas avoir reconnu sa démarche, de ne pas s'être rappelé qu'un Soma habitait dans le coin (pourtant elle le savait, elle lui avait deja livré des plats, un type nommé Shiguré !), et que donc il etait possible qu'ils se connaissent.
Des milliers de pensées traversèrent son esprit durant la seconde qu'il fallut a la jeune fille pour reconnaitre l'elu de son coeur.
Elle lui rendit son regard. Dans ses yeux egalement c'etait le chaos. Surprise, joie, amour, déception, douleur (elle avait mal quand même), culpabilité (elle avait falli le blesser), fatigue (on peut le comprendre), tendresse, gêne, colère...et tant d'autres emotions s'y melaient.
Le regard d'Hatori etait semblable a la neige, calme et apaisant, celui de Kajila lui ressemblait, une vrai tornade de flammequi tournait sur elle même et menacait de tout emporter.
Comme quelqu'une qui ne s'est pas cassée la cheville mais qui s'est méchamment égratignée, Hatori-sama, tenta t'elle de plaisanter, laissant passer le prénom du médecin dans sa précipitation (il faut dire qu'elle etait sonnée tout de même et par la chute et par l'apparition d'Hatori), et se passant la main dans les cheveux pour cacher sa gêne, puis elle ajouta, plus sérieuse. Mais en fait je vais plutôt bien, j'en serais quitte pour rentrer a pied et doucement cette fois-ci, c'est tout. Je vous remercie de la peine que vous prenez pour moi.
Elle lui fit un timide sourire, qui contrastait avec son ton généralement enjoué, lui tendit la main pour qu'il l'aide a se relever, et continua avec une once de culpabilité mais avec une fierté qui montrait bien qu'elle ne s'excusait pas souvent
Je suis désolée pour le dérangement, je roulais trop vite et je ne vous ai pas vu, je suis heureuse que vous n'ayez rien, cela m'aurait ennuyée de vous avoir heurté.

Elle ne s'etait pas rendu compte que le jeune homme n'avait pas vu sa tentative d'évitement et tenait a s'en excuser. S'il etait une personne au monde qu'elle ne voulait pas blesser, c'etait bien Hatori !

Alors qu'il l'examinait, il vit la jeune fille frissonner et ignorant que c'était de surprise, il enleva son long manteau et le déposa sur ses épaules, pensant qu'elle avait froid après le choc de sa chute. Son geste comme d'habitude avait été effectué avec calme. A croire que rien ne pourrait jamais agacer ou dégeler l'homme qu'il avait toujours été. Son regard croisa un instant celui de la blessée et il le détourna lentement, refusant de montrer que cela le mettait mal à l'aise. Les yeux de la jeune fille exprimaient tant de choses à la fois alors que lui savait le sien sombre, triste, morne...

Pour ne pas paraître impoli, il se leva au même moment et relissa ses vêtements. Même sans son manteau, il n'avait pas froid. Le printemps revenait petit à petit et les arbres étaient couvertes de bourgeons, de jeunes feuilles et fleurs. Bientôt viendrait le temps du Hanami. Et Kana ne serait toujours plus là... Il ferma les yeux un court instant et soupira imperceptiblement. Pourrait-il un jour se débarrasser de ce fardeau qu'Akito avait jeté à tout jamais sur son coeur?

La voix de Kajila le sortit de sa douce mélancolie et il rebaissa les yeux vers elle. Il sourit doucement à sa petite réplique mais il était très dur de le faire rire, voire même impossible. Mais.... comment cette inconnue pouvait-elle connaître son nom? Le médecin était intrigué mais resta de marbre face à elle.

"Je suis soulagé d'entendre que vous vous sentiez bien. Le peu de votre chute que j'ai pu voir était pour le moins impressionnant. Vous devriez prendre appui sur votre vélo pour épargner votre cheville." lui conseilla-t-il. Impossible en tant que maudit que de lui proposer de s'appuyer sur lui... "Ma voiture est au bout du sentier, je vous raccompagnerais si vous voulez. votre vélo rentrera parfaitement dans mon coffre."

Cette situation atypique le mettait quelque peu mal à l'aise mais il s'efforça de se comporter comme le ferait n'importe quel autre homme un tant soit peu civilisé. Il prit délicatement mais fermement la main qu'elle lui tendait et tira sans accoup pour qu'ils ne viennent pas à se toucher de trop près. Il n'était vraiment pas d'humeur à avoir recours à ses pouvoirs...

"Ne vous excusez pas. Il y a eu plus de peur que de mal et vous ne m'avez pas touché, alors n'en parlons plus. Par contre.... je me demandais....... comment pouvez-vous connaître mon prénom?"

Sans pouvoir mettre le doigt dessus, Hatori sentait en Kajila une énergie, une spontanéité et un sens de la réplique qui lui rappelaient quelque chose... ou plutôt quelqu'un... Mais qui?

Une ombre par-dessus la detresse de Kaj et le poid et la chaleur soudains d'un manteau sur ses epaules. La jeune fille etait fatiguée, elle en eut les larmes aux yeux. Tant de gentillesse, elle n'avait pas l'habitude, elle avait oublié que ce genre de gestes existaient, l'avait elle seulement jamais su ? Ses parents n'avaient pas 5 minutes a perdre dans de telles futilités, ses nombreuses babysitter etaient motivées par la paye, et depuis qu'elle vivait seule...
Elle n'avait pas froid, et pourtant elle ressera le vetement autour d'elle, son vêtement, a lui, autour de ses epaules, a elle.
Sans un mot il se releva et lissa ses vetements. Un battement de cil fit disparaitre les larmes naissantes de la jeune femme. Un sourire attendrit vint jouer sur ses levres. Ce qu'il etait mignon a s'assurer d'être toujours si bien mit ! Heureusement qu'il avait fermé lesyeux et ne pouvait pas la voir ! Son coeur se serra, il avait l'air si triste. A quoi pouvait il donc bien penser ? Mais quand leur regards se croiserent a nouveau, celui de Kaj etait normalement gai, presque calme, quand a Hatori...il sourit a sa plaisenterie ! Kaj avait assez observé le médecin pour savoir que ce genre de sourire etait deja rare. Elle rit, heureuse.

Ah ! Un sourire, j'ai gagné !

Puis plus sérieusement mais toujours avec humour

Vous devriez sourire plus souvent vous savez... (cela vous va si bien de sourire...je ferais n'importe quoi pour voir la joie passer dans vos yeux, vous êtes deja si beau Hatori-san, le bonheur vous rendrait littéralement irrésistible... mais surtout en sent tellement de gentillesse en vous, vous mérieriez vraiment d'être heureux. ) Perdue dans ses pensées et comme le médecin cachait ses emotion, la jeune fille ne se rendit pas tout de suite compte de son erreur. Continuant la discussion, elle haussa les epaules et rattrapa d'une main le manteau que ce geste avait déplacé.

Il en faut plus pour m'arrêter. Ne vous inquietez pas, a partir du moment ou je serais debout, tout ira bien !

Seulement Hatori ne s'arrêta pas la et lui offrit de la racompagner en voiture. Kaj en fut tellement surprise qu'elle en resta sans voix, attacahnt son regard incrédule sur le visage du jeune homme. Il...lui...mais...elle n'etait pas montée dans une voiture depuis une éternité...mais une jeune fille bien élevée ne montait pas dans la voiture d'un inconnu...mais c'etait Hatori, elle pourrait rester plus longtemps pret de lui, avec lui, parler avec lui...mais...
Elle baissa la tête, elle ne pouvait lui montrer ou elle vivait. Un immeuble abandonné et sombre dans le quartier mal famé...qu'allait il penser d'elle ?
Elle saisit sa main, toujours pensive et hesitante et se releva souplement et sans soucis. Elle etait a présent tout pret de lui, sans le toucher bien sur mais assez pret pour que cela devienne...gênant ? Agréable ? peu importait, elle etait bien la, dans la nuit, loin de tout, pret d'Hatori. Elle n'avait pas peur, elle etait troublée pensive, indécise mais par dessus tout, elle etait bien.
Elle leva la tête pour refuser son invitation avec une pointe de tristesse.

C'est...tres généreux a vous mais...j'habite loin et je ne veux pas vous retarder plus que necessaire.

Elle voulu tester sa cheville et la douleur lui fit froncer les sourcils. A pied elle en avait jusqu'au matin et en souffrant en plus ! Elle releva la tête qu'elle avait baissée pour cacher sa douleur. Elle aurait aimé lui demander de l'accompagner tout de même jusqu'a l'entrée de la ville mais ne le put. Quelque chose en elle l'empêchait de demander, même à Hatori.
Elle ramassa son vélo tant bien que mal et remis sur ses epaules le manteau décidément trop grand. Chassez le naturel, il reviens au galop ! Kajila, enfin debout (sur un pied mais debout), son vélo dans les mains et le manteau d'Hatori sur ses epaules se sentait invincible. La question du jeune homme la prit encore une fois par surprise (elle n'avait pas fait expres d'appeler Hatori par son prénom et ne l'avait plus fait depuis), mais elle réagit au quart de tour avec un grand sourire.

Je vous ai deja vu une fois, il y a (7 ans 3 mois, 2 semaines et 1 jour) quelques temps. Et ce jour la j'ai entendu quelqu'un vous nommer. Je n'oublie jamais un visage (surtout le votre).

S'il ne se souvenait plus d'elle, c'etait tant mieux, elle voulait le proteger, même de lui...

Hatori vit la jeune fille resserrer son manteau autour d'elle et cela le soulagea de voir qu'il avait bien agi. Il pouvait être si maladroit parfois à force de toujours vouloir rester impossiblement calme et placide. Elle se moqua gentiment de lui en apercevant son sourire, il aurait voulu répondre quelque chose mais finalement resta coi. Ce n'était pas son genre d'exposer ses pensées ou sentiments aux autres, encore moins à une inconnue... même si celle-ci avait un petit quelque chose qui ne cessait de le faire cogiter. Quand Kajila lui dit qu'il devrait sourire plus souvent, immédiatement, l'image d'une Kana souriante lui revint en mémoire. Elle aussi lui avait dit cette phrase, rayonnante de bonheur. Son coeur le tirailla. Pourrait-il un jour l'oublier? Elle qui avait su amener un peu de soleil dans sa piètre existence au service d'Akito.

Il voyait bien que Kajila était gênée, après tout, ils ne se connaissaient pas et monter dans la voiture d'un étranger ne devait pas lui paraître très raisonnable, c'est pourquoi il n'osa pas insister.
La proximité de la jeune fille le mit mal à l'aise et il espéra ne pas l'avoir laissé transparaître. Quant à Kajila, comme il s'en doutait, sa cheville n'allait pas si bien que cela vu son froncement de sourcils. Elle ramassa son vélo avant même qu'Hatori ait le temps de réagir et de l'y aider.

"Si vous insistez, je ne vais pas vous ennuyer mais je vous raccompagne au moins jusqu'à la route principale pour m'assurer que vous pouvez réellement rentrer seule. Je ne peux pas laisser une jeune fille la nuit au beau milieu de nulle part." dit-il d'une voix monotone.

Puis la réponse de Kajila renforça en lui ce sentiment qu'ils se connaissaient déjà. Mais cela devait faire un moment. Il avait bonne mémoire et n'arrivait cependant pas à la resituer.

"Quand était-ce? J'avoue avoir la curieuse sensation de vous connaître mais...."

Il ne put terminer sa phrase, ses yeux verts plongés dans ceux de la jeune fille.

(Ce n'est pas important, rien de tout cela n'est important, il faut protéger Hatori-san) se repetait elle a part elle dans sa tête, cherchant a cacher sa déception et sa colère. Non seulement il ne l'avait pas reconnue mais il agissait par pitié. Sinon, même lui, aurait il eu une voix si monotone ? Oh, il etait galant, et tres correct, on ne pouvait le lui reprocher. Mais cette facon de dire...elle avait bien fait de refuser, pour la voiture. Le fait qu'il n'insite pas prouvait bien que ce n'etait qu'une invitation de pure forme. La tristesse la fit frissonner a nouveau et elle "se blottit" dans le grand manteau. Etrange non ? La tristesse que lui provoquait Hatori-san ne se calmait que dans le manteau d'Hatori-san. Ce qu'on est idiot quand on est amoureux !
Ne pouvant rien répondre et ne voyant d'ailleurs rien a répondre a l'affirmation du médecin, elle hocha la tête avec difficulté avant de baisser les yeux sur ses chaussures. Sans le vouloir, il lui avait fait tres mal. Elle se savait susceptible, voire même hypersensible lorsqu'il s'agissait de lui mais tout de même...
Soudain, elle sentit un regard sur elle. Machinalement elle leva les yeux pour tomber dans ceux d'Hatori.

Ce regard...elle ne pouvait s'en détacher, elle se sentait totalement prisonniere de ces yeux qui la dominaient totalement. C'etait a la fois déstabilisant et magique.
La tristesse et la colere qui transparaissaient au debut se transformèrent en douceur, en gaité, puis en tendresse et enfin les yeux bruns se voilèrent tandis qu'elle partait dans ses souvenirs.

Flash-Back (^_^)
Un jour comme les autres. Kajila avait décrété a la sortie des cours qu'elle allait se promener et personne n'avait répondu. Elle s'etait engagée dans plusieurs rues sans noms. A l'époque, elle ne supportait plus de rester a la maison et passait ses apres midi seule dans la ville.
Elle marchait doucement, la brise faisait flotter sa robe vert foncée et ses petites chaussures assorties. Une tenue de poupée, comme elle en avait tant. Kaj détestait deja a l'epoque dêtre habillée comme "une petite fille de bonne famille", même si c'etait exactement ce qu'elle etait.
Ses longs cheveux chatains, a peine plus clairs que maintenant battaient ses reins. Elle les avait tressé ce jour la. Elle n'aimait pas spécialement les cheveux longs mais ne supportant pas qu'on lui touche les cheveux elle avait décrété ne pas vouloir qu'on les lui coupe. Et comme toujours, ses parents avaient cédés.
Sa natte se terminait par un petit noeud de la même couleur et etoffe que la robe.
Elle se souvint etre arrivée devant une grande demeure au nom des Soma. Elle ne la connaissait pas a l'epoque, mais s'etait arrêtée, curieuse. Elle ne savait pas que la famille de sa mère, qu'elle n'avait jamais vue, etait aussi grande !

C'est alors que sa vie avait basculée. Elle vit un homme, grand, beau, a la voix grave et envoutante parler a un petit garcon aux cheveux gris a peine plus jeune qu'elle même. Il lui demandait de rentrer et le petit garcon qui n'avait visiblement pas tres envie avait, voulant le convaincre, nommé l'homme "Hatori".
Elle ne vit pas vraiment ce qui c'etait passé par la suite mais une forte explosion se fit entendre et a la place du petit garcon, perdu dans ses vêtements, se trouvait un rat blanc.
"Alors le gamin s'est transformé en rat ?" avait elle laissé echapper, un peu surprise mais pas plus que cela, l'imaginaire de l'enfant etant peuplé de magie....

/flash Back

Le calme revint dans ses yeux, malgré une pointe de tristesse. Il etait normal qu'il ne l'aie pas reconnu. Elle avait grandit, elle avait changé. Comment reconnaitre en cette jeune fille aux cheveux courts en bataille, la tunique dechirée, le visage plein de terre, la petite fille bien mise qu'elle etait alors ? Même si ses yeux etaient restés les mêmes, même si elle se passait toujours la main dans les cheveux lorsqu'elle etait gênée, même si sa voix et sa vivacité n'avaient pas changés. Comment pouvait il la reconnaitre apres 7 ans, et en pleine nuit ?
Non, elle ne pouvait pas lui en vouloir, puis c'etait mieux ainsi.
Elle se rendit compte qu'un long (?) moment etait passé et qu'il devait toujours attendre une réponse.
Elle détourna les yeux avec difficulté. Elle serait bien restée des heures a le contempler mais ce n'etait pas le moment !

"C'etait il y a trop longtemps pour que cela aie la moindre importance a présent", fit elle doucement avant d'essayer de suivre le chemin appuyée sur son vélo.

Sa cheville lui faisait toujours mal, elle avancait comme une tortue, posant a peine le pied par terre. Mais elle ne faisait pas un bruit, pas un murmure de douleur, seuls ses sourcils froncés et sa lenteur montraient sa difficulté. Kaj se refusait toujours a montrer ses faiblesses.
A peine trois pas cependant, et elle en eut marre. Elle s'assit sur la selle de son vélo, les mains sur le guidon et se mit a le pousser du pied, comme une trotinette. Ah ! Mieux ! Tant que la route restait plane elle allait pouvoir "marcher" un peu.

Elle s'arrêta toutefois. Se retournant et regardant Hatori qui avait proposé de la raccompagner jusqu'à la route. Elle voulait profiter de sa présence, encore un peu. Cela faisait vraiment tres longtemps.
Elle sourit. Sa colere et sa tristesse etaient passées, comme toujours. Enfouies au plus profond de son coeur, avec le reste.

La phrase du médecin sur la jeune fille au milieu de la nuit, prit soudain un tout autre sens pour Kajila qui ne pu s'empecher de déclarer a voix haute.
"Le soleil se lève toujours, Hatori-sama. Il prend parfois son temps, mais il fini toujours par se lever."

Kajila se blottit une fois de plus dans le manteau qu'il lui avait gentiment proposé. Il était inquiet qu'elle n'ait été choquée par sa chute et espérait sincèrement qu'il ne s'agisse que du simple fait de la fraîcheur de la nuit. Si elle avait fait des efforts en bicyclette auparavant, le fait de rester immobile devait encore accentuer la baisse de sa température corporelle. Il était tant obnubilé par les données physiologiques qu'il ne s'était pas rendu compte que quelque chose dans son attitude avait blessé la jeune fille. Celle-ci se contenta de répondre que leur précédente rencontre avait eu lieu il y a bien longtemps. Elle tentait de paraître neutre mais quelque chose chuchotait à l'oreille du jeune médecin que cela ne lui était pas tellement égal finalement... Si seulement il pouvait se souvenir... Il l'avait sur le bout de la langue.

Ils se mirent en route et il constata rapidement que Kajila était trop fière pour avouer que sa cheville lui faisait encore mal. Elle grimpa d'ailleurs sur la selle de son vélo et avança en trottinant. Cela convenait certes bien au côté pétillant et espiègle de la jeune fille mais quelque chose clochait dans le tableau. Soudain elle s'arrêta mais le rassura vite d'un joli sourire.

Flash-Back (copyright Kaj' )
Une voix enfantine.... fière.... espiègle.... sûre d'elle...
"Je vous aime, Hatori-sama!"

Il secoua la tête, cette voix lui paraissait floue, si proche de Kajila quelque part de par ses intonations... Oui, ce n'était qu'un rêve. Il avait plus de chances de voir se lever la malédiction que de rencontrer à nouveau cette étrange petite fille à qui il n'avait pu faire oublier la transformation de Yuki. Craignant pour sa santé et sa sécurité, il avait pour une fois gardé un secret à Akito mais avertit les parents de la fillette qu'il valait mieux l'éloigner du Manoir. Peut-être qu'avec le temps, elle avait oublié tout cela?...

Il referma son veston, regarda la lune un court instant avant de jeter un coup d'oeil rapide à la cheville de Kajila. Il lui semblait qu'elle avait enflé. Il ne pouvait décemment pas la laisser rentrer ainsi. La voiture apparaissait tout au bout du chemin.
Il apprécia beaucoup la façon dont elle interpréta et commenta sa remarque sur la nuit. C'était vraiment très poétique... et optimiste...

"Oui, vous avez raison... Mais pour certaines personnes qui ne dorment pas la nuit, le temps se suspend et les ténèbres paraissent éternelles... Et alors elles se demandent si elles auront la force de croire encore au retour du jour..." dit-il d'une voix où il tenta de cacher cette blessure que lui avait faite Akito en lui faisant perdre Kana à tout jamais...

Assise sur son vélo dans la semi obscurité, Kajila observait Hatori. Pas directement, c’était impoli de dévisager les gens, lui avait on apprit. Leçon qu’elle avait d’ailleurs eu énormément de mal a retenir ! Il semblait…aussi calme que d’habitude mais peut-être plus pensif. Il secoua la tête et elle se demanda a quoi il avait bien pu penser. Il ferma alors son veston et regarda la lune. Avait-il froid ? Elle lui avait prit son manteau. Pourtant, elle, n’avait pas froid, elle était habituée a ces températures et le printemps arrivait. Si elle gardait le manteau sur les épaules c’était parce que c’était celui d’Hatori, c’était à cause de son geste, le même geste que lorsqu’on remonte la couverture sur un enfant endormit en le regardant tendrement. Le genre de geste que l’on voyait à la télévision ou dans les livres, le genre de geste qui, elle le savait, n’existait pas dans la réalité. Pourtant tout ce qui arrivait ce soir était vrai. Elle avait trop mal au bras et a la cheville pour en douter.
Elle ne vit pas le regard du médecin sur sa « foulure » mais suivit ses yeux jusqu'à la voiture. On la voyait déjà ! C’était si court. 7 ans d’attente pour moins de 10 minutes en sa compagnie ? Et pourtant elle était terriblement reconnaissante au hasard de lui avoir donné ces 10 minutes, car elle pourrait les chérir des années durant. Le bonheur ne tenait pas a grand-chose !
La voix d’Hatori-sama résonna dans le silence. C’était une voix curieuse, pas aussi froide que d’habitude, on sentait énormément de souffrance derrière.

Elle pensa alors a cette époque ou le soleil avait disparut de son cœur. A ces moments ou elle avait vu Hatori et Kana, ensemble et heureux. Le bonheur faisait briller les yeux verts du jeune homme, le rendant plus beau que jamais, et cette fille…elle semblait, elle aussi, si remplie de joie que Kaj n’arrivait même pas a lui en vouloir, elle se contentait de regarder ce couple évoluer dans sa bulle d’amour, elle les regardait s’embrasser, se tenir la main, discuter, rêver ensemble, elle les regardait de loin, cachée, car elle ne devait pas montrer qu’elle se souvenait, car Hatori ne devait pas la voir, car, malgré son égoïsme, elle ne voulait gâcher l’avenir de celui qu’elle aimait.
Pendant toute cette période, quelque chose s’était « éteint » en elle. Son soleil intérieur s’était couché et il ne restait plus que froid et ténèbres. Et comme elle n’était pas devin, il lui avait semblé que l’espoir était mort.
Oui… fit elle, laissant passer toute la tristesse qu’elle avait ressentit alors pour que le médecin comprenne bien qu’elle parlait en connaissance de cause.
Mais inexplicablement et pour des raisons que, faute d’éléments, Kajila ne pouvait comprendre, le soleil s’était levé pour elle, il y avait bientôt 2 ans. C’était la qu’elle trouvait la force de croire au retour du matin.
Elle savait qu’un jour, le soleil se lèverait pour Hatori, elle espérait en être la cause, mais, même si ce n’était pas le cas, elle était persuadée qu’il y aurait encore de nombreux beaux jours pour le médecin.
Elle regarda la lune, pensive mais souriante.
La lune est le reflet de nos soleils passés… elle nous rappelle que ces soleils ont existés, c’est lorsqu’elle décroît que l’on sait que le soleil va se lever et pourtant c’est d’elle que sortent les ombres les plus effrayantes… (je n’y ai jamais vraiment réfléchit jusqu’ici. A quel point cette image est elle proche de la réalité ?)
La jeune fille réfléchit rapidement à tout cela. Elle voyait tant de façons de continuer son image. Mais peut être le jeune homme les voyait il lui aussi. Elle se demandait si elle devait ou non continuer. Avait il compris que, des deux, c’était lui, la « jeune fille laissée seule en pleine nuit au milieu de nulle part » ?
Elle rit doucement.
Parfois, on trouve la force de croire, simplement dans un sourire.
La voiture était la, devant eux. Le rêve était fini, il lui fallait partir a présent. Elle hésitait, elle ne savait pas quoi dire pour prendre congé. (Vu notre conversation je ne peux décemment pas lui souhaiter une « bonne nuit » !)
Flash-Back
Kajila descendait de la voiture d’Hatori qui l’avait raccompagné chez elle « pour qu’elle ne se perde pas ». Il avait voulut parler a ses parents mais ils n’étaient pas la, comme d’habitude [HJ tu leur a parlé plus tard, n’est ce pas Hatori-sama ?]. Elle s’était alors tournée vers cet homme si étrange et qu’elle aimait déjà tellement. Elle ne savait pas comment prendre congé. Jamais on ne lui avait expliqué comment se sortir d’une telle situation. Elle avait donc improvisé et dit avec douceur et simplicité :
Aligato, Hatori-sama. Ne m’oubliez pas !
/flash-back

Les mots résonnèrent dans son esprit et la phrase sortit de sa bouche sans qu’elle l’ait vraiment décidé :
Aligato, Hatori-sama. Ne m’oubliez pas !
Elle rougit doucement a cette imprudence. Elle ne savait pas si elle esperait qu’il la reconnaisse ou si elle préferait rester anonyme.
Elle le regarda une dernière fois pour graver ce moment dans son cœur, puis, lui tournant le dos, elle s’engagea doucement sur la route, bien décidée a rentrer par ses propres moyens, mais le manteau de son amour toujours précieusement sur ses epaules.

Hatori se sentait de plus en plus d'humeur mélancolique. Voir Kyô et Yuki s'ouvrir à Tohru lui faisait plaisir et il souhaitait plus que tout les protéger d'Akito, mais d'un autre côté, ces sourires, cette bonne humeur, une présence féminine rassurante, tout cela ne le faisait que d'avantage penser à Kana. La nuit l'attristait également. Comme il l'avait dit à Kajila, elle semblait éternelle, comme si le soleil s'était éteint à tout jamais et que les ténèbres règneraient à tout jamais sur son coeur. Pourtant, il appréciait la compagnie de la jeune fille bien qu'il ne soit pas trop à l'aise. Et ce flashback... Pourquoi se souvenir de cela maintenant? Le jeune médecin se frotta la nuque d'un air las. Tant de questions et si peu de réponses...

La fierté et la joie semblaient émaner de Kajila, mais Hatori était loin d'imaginer les souffrances qu'il lui avait infligées lorsqu'il vivait avec Kana. C'était la seule époque de sa vie où il s'était permis de penser à lui avant de veiller sur les autres, et il s'était promis de ne plus jamais retomber dans le même piège. C'était bien trop dur après, une fois que vous perdiez ce que vous attendiez depuis toujours...
Il leva à nouveau la tête pour regarder la lune en même temps que les paroles de Kajila et soupira doucement, le coeur douloureux. Pourquoi fallait-il toujours que les fantômes du passé vous hantent ainsi? Cela serait tellement plus simple de tourner la page... Kana avait pu le faire, elle s'était mariée en oubliant tous ces merveilleux moments qu'ils avaient vécus ensemble... Oubliés à tout jamais... A cause de son don... A cause de lui... Il aurait dû être plus prudent avec Akito...

Il redescendit sur terre mais il n'avait plus la force de sourire depuis un bon moment déjà... Même s'il le voulait... Il ne saurait probablement plus comment le faire. Il n'eut pas le coeur de continuer cette jolie métaphore de la vie et profita qu'ils étaient arrivés à la voiture pour détourner la conversation. Alors qu'il ouvrit la bouche pour lui dire de monter sur le siège du passager, Kajila le remercia assez étrangement:
Aligato, Hatori-sama. Ne m’oubliez pas!

Sans savoir encore pourquoi son coeur se mit à battre plus rapidement. la phrase l'avait percuté de plein fouet, plus sûrement que les coups d'Akito. L'image de cette fillette réapparut, cela ne pouvait être une coïncidence!... Mais d'un autre côté, pourquoi serait-elle revenue près des habitations Soma?
Kajila prit alors son élan pour repartir et Hatori resta figé sur place pendant quelques secondes avant de faire 2-3 pas en avant en tendant la main vers la jeune fille qui était pourtant déjà hors de portée.

"Attendez!!! Je.... Votre cheville... elle est encore plus enflée... je... je vais vous raccompagner, c'est plus prudent!" annonça-t-il tout à coup avant qu'elle ne soit hors de portée de voix.

Il avait failli lui demander si elle était bien la Kajila Sôma de ce jour qui lui paraissait si loin qu'il en avait le vertige. Akito l'avait encore condamné à effacer la mémoire d'une fillette ayant vu Yuki se transformer. Il ne voulait pas mais n'avait pas non plus le choix. il avait obéi mais son don lui avait fait défaut. Il n'avait jamais compris pourquoi mais il fallait garder ce secret ou Akito leur en voudrait à tous les deux...

Pour une fois, Kajila ne vit rien de l'humeur d'Hatori. Elle essayait de s'en aller, triste, les larmes au bord des yeux avec l'impression de laisser son coeur derriere elle. Elle avait envie de se retourner, de crier son amour a Hatori, de lui demander de se souvenir d'elle, de ne pas la laisser seule, pour lui dire qu'elle l'aimait, pour passer sa vie avec lui...

Mais il fallait être raisonnable, il fallait se taire et rentrer a la maison, cacher ses sentiments, cacher sa fatigue et sa douleur. Sourire et être forte comme d'habitude !

Elle avancait doucement mais surement, se refusant a montrer le moindre signe de faiblesse. La fierté, a defaut de la joie, etait vraiment l'une des caractéristiques principales de la jeune fille.

Une voix retentit dans la nuit. Hatori la rappelait ! Kajila se figea, le coeur battant, restant une bonne minute immobile sur la route sans oser se retourner.
Doucement, la jeune fille revint assez de sa surprise pour faire tranquillement demi-tour et jeter un oeil étonné sur le medecin.

Il avait l'air troublé...elle l'etait également.
La joie vint colorer ses joues et faire briller a nouveau ses yeux. Un sourire naquit et s'épanoui sur son visage. Elle rit. Il avait l'air assez perdu, seul dans la nuit, la main tendue vers elle. Et c'etait la premiere fois qu'elle le voyait begayer ou chercher ses mots.

Elle s'approcha de lui, assez pour pouvoir parler sans crier. Elle jeta alors un coup d'oeil a sa cheville qui avait effectivement enflée.

Oui c'est vrai, elle a enflé. D'ailleurs je le lui avait formellement interdit ! C'est un monde tout de même, les chevilles d'aujourd'hui n'ont plus aucun respect pour leurs aînés !

Plaisanta-t-elle, non pour le faire sourire mais simplement pour dédramatiser la situation.

Elle rougit et baissa la tête. Elle voulait bien qu'il la raccompagne. Pas chez elle bien sur, il ne fallait pas qu'il voit son squatte mais au moins jusqu'au manoir, ainsi elle pourrait passer plus de temps avec lui, elle ne voulait plus le quitter.

Si vous insistez...

fit elle d'une petite voix avant de se reprendre et de dire plus fierement :

Mais je ne veux pas vous poser plus de soucis que necessaire, vous n'avez cas rentrer chez vous et je me debrouillerais pour le reste du chemin. Cela vous convient ?

Timide, elle leva ses yeux vers lui. Son regard etait calme, ses protections tombaient un peu. On pouvait lire de la timidité (et oui qui l'eut cru), de la fierté, bien sur, et caché au fond de ses yeux, une tristesse bien reelle.

Elle baissa les yeux et repartit vers la voiture, toujours assise sur son vélo. Passant devant Hatori, elle hésita a lui prendre la main mais n'en fit finalement rien. Les contacts physique, c'etait pas son truc.

Arrivée a la voiture elle descendit de vélo et s'appuya sur la voiture. Ses souvenirs revenaient, lui donnant un air legerement melancolique mais toujours souriant sous la lune. Elle attendait que le medecin lui confirme son invitation et l'aide a ranger le vélo dans le coffre tout en essayant de juguler les flash-backs...

Pendant un instant, Hatori crut que la jeune fille ne l'avait pas entendu mais elle finit tout de même par s'arrêter, sans toutefois se retourner. Mais qui était-elle vraiment? Elle avait un caractère si... particulier. Il devait bien admettre qu'elle le déroutait complètement. Il aurait été plus simple et moins dangereux pour lui de la laisser rentrer par ses propres moyens mais ses devoirs en tant que médecin l'en empêchaient..... Mais à qui mentait-il là?! Non, il n'y avait pas *que* du devoir, quelque chose lui disait de ne pas la laisser partir ainsi. Et une fois de plus, il retrouva dans ses souvenirs le même regard pétillant de l'adolescente devant lui.

Kajila avait les joues colorées mais il ne se douta de rien, il mit cela sur le compte de l'effort physique et de la douleur. La petite fille qu'il avait connue aurait elle aussi tourné sa blessure en dérision. Hatori était de plus en plus troublé mais faisait tout pour le cacher. Elle ne devait pas savoir qu'il l'avait reconnue. Il la raccompagnerait, oublierait où elle habite et ne la reverrait plus jamais. Pour son bien.

"Je ne vous l'aurais pas demandé si cela me dérangeait. Je suis en voiture, je peux bien faire un détour par chez vous, ne vous inquiétez donc pas autant." la rassura-t-il.

Hatori fut étonné de la voir un peu timide. Il en aurait souri s'il le pouvait encore. Il abaissa la main qu'elle avait refusée sur le vélo et de l'autre sélectionna la clé du coffre. Lorsque Kajila accepta enfin de s'asseoir sur le siège du passager, il ouvrit le coffre et déposa le vélo à l'intérieur avant de se mettre au volant. Il appuya sur la petite lumière au-dessus du rétroviseur et enfourna la clé de contact sans toutefois la tourner.

"Bien. Vous habitez dans quel coin?" lui demanda-t-il.

Et bien...le sort en etait jeté, Hatori allait la raccompagner. Kajila ne savait pas si elle devait s'en réjouir ou s'en effrayer.

Elle etait heureuse d'être pret de lui et de lui parler. De sentir son regard, enfin d'être a ses cotés. Elle savait qu'elle pourrait passer sa vie sans parler, rien qu'a être avec lui. Elle se sentait a la fois euphorique et effrayée. C'etait étrange, d'habitude, elle avait toujours de nombreuses emotions, souvent contradictoires mais les unes apres les autres et non pas en même temps. La tout etait melangé. La peur de ne pas être a la hauteur, la tristesse d'avoir désobei a l'un de ses preceptes de base. Puis elle pouvait l'avoir mis en danger.

Elle le laissa prendre son précieux vélo sans mot dire, les sourcils froncés mais les yeux dans le vague.
Elle carressa un moment la porte. Elle n'etait jamais montée devant dans une voiture. Elle n'avait jamais eu l'age...il y avait tant de choses normales pour tous qui lui etaient inconnues. Pourrait elle lui en parler un jour ? Aurait elle honte de cette période ?

Elle s'assit a sa place et boucla sa ceinture. Elle se souvenait du mecanisme, heureusement. Ses yeux allaient sa et la dans le vehicule. On voyait vraiment bien la route d'ici. C'etait cool.

Elle sourit.

Elle aurait pu rentrer a pied, c'etait cool mais une solution de facilité. Enfin elle n'allait pas se plaindre, elle etait avec Hatori...

Lequel Hatori s'etait finalement assis a coté d'elle, à la place du conducteur, et alluma une lumiere cachée sur le plafond.
Surprise elle leva la tête avant de se tourner vers Hatori comme pour lui demander ce qu'il faisait.
C'est alors qu'il lui demanda ou elle habitait. La question qu'elle redoutait entre toute. Elle rougit violement et fixa ses pieds. Elle s'etait demandée si elle devait lui mentir ou pas. C'etait si facile de lui donner une fausse adresse et de se rentrer apres...

Mais elle mentait deja sans arret a tout le monde. Elle refusait de mentir aux gens qu'elle aimait. Elle ne voulait pas mentir a Hatori-sama !

Soudain, elle serra les poings et ses yeux lancerent des eclairs. elle n'avait pas a avoir honte de son squatte. Cet immeuble c'etait son indépendance, c'etait sa liberté, c'etait la vraie face d'un mensonge dans lequel on avait voulu l'enfoncer. Elle aimait son étage, elle l'avait amménagé, il etait propre et bien tenu. Elle etait fiere de sa debrouillardise, et s'il n'etait pas content c'etait pareil. Elle l'aimait mais elle resterait elle même.

J'habite dans le quartier nord-est, derriere le parc.

*Le quartier des paumés, des drogués et des yankees. Mon quartier quoi !*

Elle le fixa un moment comme pour le defier de faire une quelconque remarque sur son quartier puis, soudainement baissa les yeux et desserra le poing.

Je suis désolée. Déposez moi ou cela sera le mieux, je me débrouillerais.

Elle tourna la tête pour fixer la fenetre.

Aligato...

Hatori crut déceler une petite lueur de surprise dans le regard de Kajila lorsqu'elle se tourna vers lui mais il n'avait rien fait ou dit d'extraordinaire, aussi en déduit-il que la nuit et la petite lumière d'intérieur lui avaient joué des tours. Mais le comportement étrange de l'adolescente ne s'arrêta pas là. Elle se mit à rougir violemment lorsqu'il lui demanda où elle habitait. Craignait-elle qu'il revienne l'ennuyer plus tard s'il connaissait son adresse? Hatori était perplexe... Mais il ne tarda pas à comprendre, Kajila lui lança un regard plein de défi en lui avouant vivre dans les quartiers malfamés. Pendant un instant, il avait envisagé lui demander comment elle avait pu atterrir dans un tel endroit mais il s'en abstint bien en voyant la fierté de Kajila. Oui elle pouvait l'être! survivre dans un endroit pareil n'était pas facile... Hatori n'était néanmoins pas rassuré de la savoir là-bas. Quand Kajila se tourna vers la fenêtre, Hatori poussa un soupir quasi inaudible avant de fouiller dans les poches de sa veste et d'en sortir son briquet et une cigarette. Il l'alluma rapidement et ouvrit la fenêtre. Après avoir expiré la fumée au dehors, il régla rapidement son rétroviseur et mit le contact. La voiture se mit doucement à ronronner et Hatori se retourna pour vérifier où il allait en marche arrière. Il s'engagea ainsi doucement sur la route déserte à cette heure de la nuit.

"Et bien allons au Nord-Est alors!" confirma-t-il en ignorant la proposition de Kajila de la déposer ailleurs.

Il glissa sa cigarette entre ses lèvres et mit la marche avant, appuyant doucement sur la pédale d'accélération et enclenchant les vitesses. Il roulait prudemment, comme à son habitude. Cinq minutes s'écoulèrent alors dans le silence avant qu'ils ne durent s'arrêter à un feu rouge.

"Comment va votre cheville?" s'enquit-il d'une voix neutre, alors qu'il était en fait mal à l'aise de ce vide entre eux et tentait tant bien que mal de lancer une discussion.

Et Hatori ne reagit pas. Kajila ne savait pas si elle devait etre soulagée ou decue de l'absence de questions. En même temps, le medecin etait un homme peu communicatif, elle le savait. Il n'etait donc pas surprenant qu'il ne reagisse que par le silence.
A travers la fenêtre, elle regardait le paysage, immobile. Elle aimait la nuits et ses ombres, elle pouvait l'aimer parce qu'elle savait, elle, que ce n'etait que passager.
Soudain, un courant d'air la tira de sa courte rêverie. Elle tourna la tête pour voir le dragon tirer une cigarette et l'allumer. Elle fronca legerement les sourcils. Elle n'aimait pas le voir fumer. Mais elle n'etait pas assez proche de lui pour le lui dire. Pas encore en tout cas !

La voiture démarra dans la nuit et le regard de la jeune fille fut de nouveau attiré par le paysage qui defilait a l'exterieur. Elle ne disait rien. Elle n'en ressentait pas le besoin a vrai dire car elle avait l'habitude d'être seule et silencieuse.

Malgre la douleur et la fatigue, toujours bien présente, elle etait tres heureuse d'être la. Pour commencer elle pouvait voir le medecin par son reflet dans la vitre, enfin tant qu'il n'y avait pas trop de lumieres a l'exterieur, apres ce fut plus dur. Elle reussi donc a lui jeter quelques coups d'oeils qu'elle esperait pas trop indiscrets. C'etait tellement troublant pour elle de le sentir si proche...apres 7 ans a ne le regarder que de loin !

C'est a ce moment que Kaj prit la décision de ne plus accepter cela, de le revoir aussi souvent que possible. Toujours sans le mettre en danger mais, apres tout, maintenant que le hasard les avait a nouveau reunis et que, cette fois, elle pouvait s'en souvenir, elle avait le droit de vouloir le revoir !

Puis....l'histoire avec Kana lui avait vraiment fait tres peur, elle ne voulait pas le perdre sans pouvoir tenter sa chance !

Elle se jura donc de ne plus "l'oublier", de le comprendre, de ne plus le laisser l'oublier, de faire son possible pour devenir son amie, pour le refaire sourire...

C'est a ce moment qu'il lui demanda comment allait sa cheville. Encore une fois, elle lui lanca un regard etonné. Il ne semblait pas être le genre d'homme a relancer des conversations pourtant.

Mais bien vite, la surprise se transforma en un grand sourire et un haussement d'épaule dedaigneux.

Elle râle, elle adore raler mais ce n'est pas pour cela qu'elle ne retournera pas travailler demain !

En effet, Kaj n'avait pas envie de montrer so entorse aux autres alors elle avait décidé de faire comme si de rien etait et d'aller au lycée et au boulot comme prévu.

Puis plus serieuse.

Je me ferais un bandage a la maison.

En parlant de maison, on commencait a arriver. Les beaux pavillons que l'on avait croisé au début du voyage, avec leur grandes rues propres eclairées avaient fait place a de grands immeubles en béton dans des rues sombres et jonchées de détritus.

Faut prendre la seconde a droite puis au troisieme feu a droite encore et enfin la premiere petite impasse sur la gauche.

Elle se frotta le bras et continua comme s'il n'y avait eu aucune interruption.

Avec un peu de pommade et une bande bien serrée, elle devrait pouvoir ne pas trop raler et guerir toute seule d'ici quelques jours sans m'empêcher d'aller bosser je crois. Va aussi falloir que je désinfecte mon bras.

Elle sourit.

Voyez, pas besoin de se faire de soucis, j'suis tout a fait capable de me soigner toute seule et il n'y a vraiment rien de grave.

La voiture entra dans l'impasse.

C'est l'immeuble du fond.

Elle le regarda a nouveau, interrogative. Bien qu'elle essaya de ne pas le montrer, elle etait tres anxieuse de voir la reaction d'Hatori lorsqu'il comprendrait qu'elle ne vivait pas dans un immeuble mais dans un squatte, un lieu sans eau, sans electricité, ni rien de ce que la plupart des gens considerait comme le "minimun vital"...les pauvres...s'ils savaient...

Elle vit les Yankees entourer la voiture mais ne s'en formalisa pas. C'etaient les filles de la bande en bas de l'immeuble. Elles ne lui feraient aucun mal, pas plus qu'a Hatori ou a sa voiture. L'honneur le leur interdisait :

Vous acceptez une tasse de thé ou vous preferez rentrer chez vous ?

Fidèle à ses habitudes, Hatori conduisait avec une prudence extrême. Toute son attention était focalisée sur la route aussi ne se rendit-il pas compte des nombreux coups d'oeil de Kajila. Et heureusement d'ailleurs car cela aurait mis le jeune médecin particulièrement mal à l'aise. Il n'avait non seulement pas l'habitude de raccompagner une jeune fille dans un quartier sensible mais ne s'était encore moins préparé à ce que la fille en question soit la même que celle qui n'avait pu oublier la transformation de Yuki et qui l'avait jadis tant intrigué. Il tapotait inconsciemment le volant chaque fois que la voiture s'immobilisait, il se posait un millier de questions mais était bien incapable d'en formuler une seule. A la sortie d'un carrefour, il se surprit à regarder dans le rétroviseur à la recherche de la silhouette de Kajila. Il secoua la tête et regarda à nouveau la route, se demandant ce qui lui prenait... Il devait vraiment être fatigué...

Aussi fut-il soulagé lorsque l'adolescente accepta de rompre le silence, même pour parler de choses badines.

' Je comprends que vous ayez besoin de travailler mais vous devriez laisser votre cheville se reposer un jour ou deux. Je peux vous signer un papier pour votre patron si vous voulez. Vous ne serez donc pas lésée. Un peu de repos vaut bien plus que tous les bandages du monde. '

Il tira une dernière fois sur sa cigarette avant de l'écraser dans le cendrier et de se frotter le menton d'un air pensif. Il n'aimait pas cette partie de la ville où il venait de pénétrer. C'était sordide, insalubre et dangereux. Un malaise régnait sur ces quartiers et Hatori n'était guère rassuré à l'idée qu'une jeune fille comme elle puisse habiter seule en ces lieux. Mais connaissant déjà la fierté de Kajila, il ne dit mot et se contenta de rallumer une cigarette tout en suivant les directives de la lycéenne. Il engagea bientôt la voiture sur un chemin cahotant et baigné dans le noir que seuls les phares parvenaient à transpercer. Ils avancèrent jusqu'au dernier bâtiment où ils s'immobilisèrent enfin.

Hatori descendit alors de la voiture et fit le tour, ignorant sciemment les yankees. Il savait qu'il ne valait mieux pas provoquer ces filles-là. Il ouvrit la portière de Kajila et entendit son invitation. Hatori était mal à l'aise. Gêné de se retrouver ainsi en tête-à-tête avec elle, il avait presque l'impression de trahir Kana quand bien même ils n'étaient plus ensemble. Mais pire encore, il trahissait le clan Sôma en taisant son adresse. Il n'avait qu'une envie, l'amener au manoir pour qu'elle puisse vivre décemment mais qui était-il pour lui donner des ordres. Il soupira et lâcha un petit nuage de nicotine avant de baisser les yeux vers Kajila toujours dans la voiture.

' Une tasse de thé me ferait en effet le plus grand bien si je ne vous dérange pas trop... ' acquiesca-t-il d'une voix douce.

Puisqu'il était là, autant s'assurer que l'adolescente disposait quand même des besoins de base, qu'elle n'avait pas froid, qu'elle avait bien à manger. Bref, il allait s'assurer qu'elle disposait d'un minimum vital ou trouver un moyen d'y remédier sans froisser sa fierté. En tant que médecin, il ne pouvait pas non plus laisser des gens vivre dans des conditions insalubres.